Dédicace à la reine d'Olympe de Gouges. La Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Etude linéaire

Olympe de gouge

Dédicace à la reine d'Olympe de Gouges. Etude linéaire 


Objet d'étude : "La littérature d'idées du XVIe siècle au XVIIIe siècle"
Oeuvre : Olympe de Gouges Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne
Parcours bac : "Écrire et combattre pour l'égalité"


 

Olympe de Gouges adressa à Marie-Antoinette une lettre où elle réclamait l'égalité entre les hommes et les femmes.

Olympe de gouge

Olympe de Gouges adressa à Marie-Antoinette une lettre où elle réclamait l'égalité entre les hommes et les femmes. Cette lettre fut jointe à sa célèbre Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, rédigée, en le pastichant, sur le modèle de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Olympe croyait, peut-être, en la solidarité spontanée, “de femme”, de la reine de France.

Madame,

Peu faite au langage que l’on tient aux Rois, je n’emploierai point l’adulation des Courtisans pour vous faire hommage de cette singulière production. Mon but, Madame, est de vous parler franchement ; je n’ai pas attendu pour m’exprimer ainsi, l’époque de la Liberté : je me suis montrée avec la même énergie dans un temps où l’aveuglement des Despotes punissait une si noble audace. 
Lorsque tout l’Empire vous accusait et vous rendait responsable de ses calamités, moi seule, dans un temps de trouble et d’orage, j’ai eu la force de prendre votre défense. Je n’ai jamais pu me persuader qu’une Princesse, élevée au sein des grandeurs, eût tous les vices de la bassesse.
Oui, Madame, lorsque j’ai vu le glaive levé sur vous, j’ai jeté mes observations entre ce glaive et la victime ; mais aujourd’hui que je vois qu’on observe de près la foule de mutins soudoyée, et qu’elle est retenue par la crainte des lois, je vous dirai, Madame, ce que je ne vous aurais pas dit alors. 
On ne vous fera jamais un crime de travailler à la restauration des moeurs, à donner à votre sexe toute la consistance dont il est susceptible. Cet ouvrage n’est pas le travail d’un jour, malheureusement pour le nouveau régime. Cette révolution ne s’opérera que quand toutes les femmes seront pénétrées de leur déplorable sort, et des droits qu’elles ont perdus dans la société. Soutenez, Madame, une si belle cause ; défendez ce sexe malheureux, et vous aurez bientôt pour vous une moitié du royaume, et le tiers au moins de l’autre. Voilà, Madame, voilà par quels exploits vous devez vous signaler et employer votre crédit. Croyez-moi, Madame, notre vie est bien peu de chose, surtout pour une Reine, quand cette vie n’est pas embellie par l’amour des peuples, et par les charmes éternels de la bienfaisance.
 S’il est vrai que des Français arment contre leur patrie toutes les puissances, pourquoi ? pour de frivoles prérogatives, pour des chimères. Croyez, Madame, si j’en juge par ce que je sens, le parti monarchique se détruira de lui-même, qu’il abandonnera tous les tyrans, et tous les cœurs se rallieront autour de la patrie pour la défendre. 
Voilà, Madame, voilà quels sont mes principes. En vous parlant de ma patrie, je perds de vue le but de cette dédicace. C’est ainsi que tout bon citoyen sacrifie sa gloire, ses intérêts, quand il n’a pour objet que ceux de son pays.

Je suis avec le plus profond respect, Madame, Votre très-humble et très-obéissante servante, De Gouges.
 

Problématique Comment Olympe de Gouges sollicite-t-elle la reine et tente-t-elle de la rallier à la cause féministe?

Olympe de gouge

Analyse linéaire 
L'épitre dédicatoire est en forme de lettre placée au début de la Déclaration, suivie par le préambule, adressée à la Reine, dans un  dialogue de femme à femme. L'auteure cherche à rallier Marie-Antoinette à sa cause, à la cause des femmes. 
Problématique
Comment Olympe de Gouges sollicite-t-elle la reine et tente-t-elle de la rallier à la cause féministe? 

Mouvements 
Mouvement 1
Un éloge non protocolaire : du début à "vous aurais pas dit alors"
Mouvement 2
Une cause féministe partagée de femme à reine : "On ne vous fera jamais un crime... bienfaisance"
Mouvement 3
La défense du bien collectif : "S'il est vrai que des Français..." jusqu'à la fin de la lettre
 

Mouvement 1 Un éloge non protocolaire : du début à "vous aurais pas dit alors"

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Mouvement 1
Un éloge non protocolaire 

La lettre s'ouvre sur  l'apostrophe à la reine, "Madame" révélant une dédicace non pas à la reine mais à la femme citoyenne. C'est dans un rapport de femme à femme que l'auteure prend position. Ce qui ne manque pas d'audace. 
Sa prise de parole met ensuite en question la démarche des courtisans, "je n’emploierai point l’adulation des Courtisans", à laquelle elle s'oppose pour faire valoir sa liberté de parole. On le constate par la majuscule à "Courtisans", l'hyperbole "adulation" et l'adverbe de manière "franchement", "vous parler franchement ". Elle met son honnêteté en avant en s'opposant aux sujets de la Reine" seulement soucieux de flatter sa Majesté, son langage est celui du peuple contre celui des Courtisans. Une liberté revendiquée dans la manière de s'adresser à la Reine se confirme par le champ lexical de la franchise, "langage", "exprimez", "montrez". Le rejet des convenances en négations totales, "je n'emploierai point", "je n'ai point attendu", souligne la valeur honorable de sa mission, défendre la liberté : "je n’ai pas attendu pour m’exprimer ainsi, l’époque de la Liberté". Cette "époque de la liberté" entre en opposition avec "le temps où l'aveuglement des Despotes punissait". 
Dans le second paragraphe, l'auteure se dévoile comme une alliée fidèle de la Reine alors même que le pays tout entier était contre elle, "Lorsque tout l'Empire vous accusait et vous rendait responsable de ces calamités, moi seule... j'ai eu la force de prendre votre défense". Marie-Antoinette était impopulaire et avait la réputation de mal gérer les finances du royaume. Mais au-delà de la mésestime du peuple, Olympe de Gouges se range du côté de la Reine comme le montrent les hyperboles et les antithèses : "Je n’ai jamais pu me persuader qu’une Princesse, élevée au sein des grandeurs, eût tous les vices de la bassesse." Elle cherche à instaurer une relation de confiance. 
La lettre se poursuit avec une allusion à l'incitation par Marie-Antoinette à Louis XVI de prendre la fuite, c'est l'épisode la fuite à Varennes ; "Oui, Madame, lorsque j’ai vu le glaive levé sur vous" : le glaive étant la métaphore, le symbole de la justice du peuple. 

Mouvement 2 Une cause féministe partagée de femme à reine : "On ne vous fera jamais un crime... bienfaisance"

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Mouvement 2
Une cause féministe partagée de femme à reine 

La deuxième partie dévoile une Reine et une femme face à la cause féministe. Par le pronom "on", Olympe de Gouges s'engage dans une critique plus collective avec l'hyperbole "crime" en négation syntaxique "On ne vous fera jamais" et l'hyperbole "toute sa consistance" pour personnifier le sexe féminin et donc la cause. Olympe de Gouges insiste sur le travail de longue haleine nécessaire à transformer les moeurs, il est question de son ouvrage, "Cet ouvrage n’est pas le travail d’un jour" et d'une révolution, celle des moeurs face aux féministes. Celle-ci est annoncée en négation restrictive, "Cette révolution ne s’opérera que quand " valorisant ainsi la révolution par et pour les femmes dans un combat pour la conquête de leurs droits, "toutes les femmes seront pénétrées de leur déplorable sort, et des droits qu’elles ont perdus dans la société." 
Les parallélismes de construction et les impératifs "Soutenez, Madame, une si belle cause : défendez ce sexe malheureux" et "Voilà, Madame, voilà par quels exploits", donnent de la profondeur et de la consistance aux propos de l'auteure, la cause est "une si belle cause", le sexe à défendre est un "sexe malhereux", l'intensif et la périphrase valorisent l'urgence et la nécessité du combat incontournable comme le suggère la double injonction à agir "vous devez vous signaler et employer votre crédit". 
La dernière phrase s'ouvre sur un impératif sollicitant la confiance de la Reine, "Croyez-moi". L'importance de la cause à défendre est soulignée au sens du combat d'une vie qui "est bien peu de chose" lorsqu'elle "n'est pas embellie par l'amour des peuples". L'idéal collectif de la cause féministe s'accorde à "l'amour des peuples" et à la "bienfaisance", "par l’amour des peuples, et par les charmes éternels de la bienfaisance."
Olympe de Gouges tente de provoquer l'empathie d'une Reine soucieuse d'asseoir son autorité au plus près du peuple et pour le plus grand bénéfice des femmes. 

Mouvement 3 La défense du bien collectif : "S'il est vrai que des Français..." jusqu'à la fin de la lettre

Olympe de gouge

Mouvement 3
La défense du bien collectif 

En question rhétorique, l'auteure revient sur le sens du vrai combat patriotique, la défense du bien collectif car " S’il est vrai que des Français arment contre leur patrie toutes les puissances, pourquoi ? " La réponse péjorative est ainsi donnée, "pour de frivoles prérogatives, pour des chimères". Contournant le but premier de la dédicace, c'est en citoyenne patriotique soucieuse de la défense du bien commun qu'Olympe de Gouges se positionne opposant à la sécurité et la santé de sa patrie les débordements tyranniques dans une opposition d'antithèses autour de la paix et la guerre : "se détruira", "abandonnera", "tyrans" et "coeurs, "se rallieront", "patrie", "défendre" 
Messagère de la paix, plus soucieuse de l'intérêt du bien commun que de son intérêt propre, "C’est ainsi que tout bon citoyen sacrifie sa gloire, ses intérêts, quand il n’a pour objet que ceux de son pays."  Olympe de Gouges en citoyenne sacrifiée pour une cause plus grande révèle en négation restrictive "n'a pour objet que ceux de son pays", l'exclusivité et l'incontournable vrai combat patriotique. 

 

Conclusion
Dans cet épitre dédicatoire, l'auteure cherche à rallier Marie-Antoinette à sa cause, à la cause des femmes oubliées par l'univers masculin de la révolution française dans un éloge non protocolaire, Olympe de Gouges multiplie les arguments avec une grande franchise pour défendre la cause féministe partagée de femme à Reine. L'écriture se met au service d'un combat, celui d'une égalité entre les hommes et les femmes sur la base d'un pastiche de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
L'essai de Condorcet sur l'admission des femmes au droits de cité de 1790 pour le combat des droits politiques fait écho à la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d'Olympe de Gouges 
 

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Olympe de Gouges, "Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne" (du "préambule" au "postambule") / Parcours : "Écrire et combattre pour l'égalité".

Date de dernière mise à jour : 04/08/2024

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