Religion, foi, croyance. Définition, opposition ou réconciliation avec la raison? Critiques de la religion bac philosophie cours, dissertations
la Culture, la religion. Critique du christianisme-Toute croyance est-elle contraire à la raison ? Toute croyance est-elle irrationnelle?
Dissertations et commentaires philosophiques sur la culture
Toute croyance est-elle irrationnelle?
Toute croyance est-elle contraire à la raison ?
la culture sert-elle à changer le monde ?
Y a t'-il en nous quelque chose qui échappe à la culture?
Suis-je défini par ma culture?
Ne travaille-t-on que pour subvenir à ses besoins ?
La culture, la religion
Qu'est-ce que la religion ? Il ne s'agit pas de traiter de telle ou telle religion mais d'envisager la réalité commune aux faits religieux dans leur globalité. Cela présuppose que l'on considère la religion comme une réalité autonome à part de la société, de l'État, des sciences. Mais il n'en a pas toujours été ainsi. Dans les sociétés primitives et traditionnelles, la religion imprègne tellement les actes et les pensées des hommes qu'elle n'existe pas comme réalité distincte. Or la recherche d'un élément universel aux diverses croyances est très difficile. Si l'on définit la religion comme la croyance en un Dieu éternel et créateur, on se rend vite compte que toutes les religions n'en conçoivent pas un. Le culte des ancêtres en Mélanésie ne reconnaît comme dieux que des morts qui ont connu la condition humaine et ses limites avant d'être divinisés. Ce n'est pas non plus la croyance en une divinité en un sens plus large car le bouddhisme est une religion sans divinité. Si l'on définit la religion comme une croyance en un autre monde, ce n'est pas vrai de toutes les religions ; certaines ne s'occupent que de ce monde-ci. Si l'on caractérise la religion par le fait qu'elle prescrit d'autres lois que celles de la cité, ce n'est pas toujours effectif car il y a des religions qui sont l'expression des croyances de la cité. Un tel invariant existe-t-il ? S'il n'existe pas au niveau du contenu, peut-on le trouver au niveau de la fonction (à quoi sert la religion ?)? Quel rôle joue la religion ? Celui de permettre aux hommes de dépasser leur intérêts immédiats, de répondre aux besoins de transcendance et de sens existentiel qui les animent. La façon que la religion a de nous mettre en relation avec la transcendance sous forme de révélation ou de dogmes perpétrés par des institutions ou une tradition est-elle compatible avec les exigences rationnelles ? Une réconciliation de la religion et de la raison n'est-elle pas concevable dans une religion naturelle (qui prétend accéder à la connaissance de Dieu et à l'action morale qui en découle par le seul recours à la raison) ? Mais n'est-ce pas alors une rationalisation de la religion ? La religion ne met-elle pas la raison face à ses limites ? A moins que l'homme n'ait seulement affaire qu'à lui-même dans la religion et que cette dernière soit une production du désir humain. Même en ce sens ne conserve-t-elle pas une place essentielle en révélant une aptitude à la transcendance et en lui donnant une expression symbolique ? Ne serait-ce pas une illusion encore plus forte que celle produite par la religion de croire que l'on peut évincer le religieux de la sphère des rapports humains ?
I - Les difficultés d'une définition-La religion s'intéresse au sacré par opposition au profane-La religion se différencie de la secte et de la magie
1. La religion s'intéresse au sacré par opposition au profane.
Définitions :
Sacré : caractère de ce qui est mis à distance, qui échappe à l'ordre du quotidien, et qui implique respect et précautions rituelles dans les rapports des hommes avec lui. Le crâne d'un ancêtre, en Mélanésie est considéré comme sacré car il met celui qui s'en approche en contact avec l'au-delà. Le sacré est le contraire du profane. Le sacré, le lieu saint, le tabou impliquent un code et une forme d'obéissance. Ainsi, dans le fameux épisode du buisson ardent, l'Éternel dit à Moise "N'approche pas d'ici, ôte tes chaussures de tes pieds; car le lieu où tu te tiens est une terre sainte (Exode, III, 5).
Profane : du latin pro, devant, hors de et fanum, temple. Tout ce qui est de l'ordre du quotidien, de la vie courante par opposition au sacré. Ces deux notions se constituent l'une par rapport à l'autre. Un acte est tabou quand il porte atteinte au sacré à savoir ce qui est délimité ou défendu et dont la transgression remettrait en cause l'ordre du monde concernant la nature ou la société. Le sacré est ce devant quoi on doit éprouver un sentiment de peur et d'effroi, de terreur et de fascination qui fait frissonner. Ce sentiment est ce qui permet le mieux de dégager le propre de toute religion en tant que telle. A partir du couple d'opposés sacré-profane se constituent d'autres couples opposés : pie-impie, sainteté-souillure, pur-impur. Cf texte de R. Callois dans L'homme et le Sacré.
2. La religion se différencie de la secte.
La distinction sacré-profane n'est pas le fait des individus mais bien de groupes sociaux. Les religions unissent les hommes parce qu'ils la pratiquent ensemble dans les lieux de culte que sont les temples, les synagogues du grec ancien sunagôgê signifiant assemblée ou réunion, les mosquées, les églises du grec ecclésia qui veut dire assemblée. Les religions énoncent des devoirs et des interdits pour la communauté. Elles constituent un lien social fort et en cela se distinguent des sectes. Ont peut définir la secte comme l'a fait Max Weber en fonction de la nature du message transmis, la secte se caractériserait par le fait qu'elle est un groupe de salut "contractuel" alors que la religion par l'Église est une institution de salut universel. Cette définition a des limites car elle rejette dans la secte tout ce qui ne suit pas la ligne officiel ou institutionnelle. En outre comment classer les sectes qui ne sont pas des déviations du christianisme comme les Krishna ? Il faut donc distinguer autrement la secte. Le père Trouslard, ancien vicaire de l'évêché de Soissons retient un seul critère, celui de la nocivité qui se manifeste au travers d'un triple conditionnement des adeptes (par la technique du bourrage de crâne, de la soumission et de l'adhésion personnelle au maître), d'une triple destruction (d'eux-mêmes, de leur famille, de la société) et de la triple escroquerie (morale, intellectuelle et financière). La religion devrait donc, quand elle ne fonctionne pas comme une secte par le biais des institutions, être le relais de l'homme à Dieu ou de façon plus large au sacré et constituer autour du sacré un lien entre les hommes.
3. La religion se différencie de la magie
Le religieux recherche le grand jour et le public alors que le rite magique le fuit, il opère en secret. Comme le dit Mauss dans Sociologie et Anthropologie : "L'isolement, comme le secret est un signe presque parfait de la nature intime du rite magique. Celui-ci est toujours le fait d'un individu ou d'individus agissant à titre privé; l'acte et l'acteur sont enveloppés de mystère.". La religion peut être considérée comme l'expression symbolique de nos idéaux moraux les plus élevés, en ce sens elle relie les hommes entre eux et les élève au-dessus de leurs préoccupations courantes tandis que la magie l'enferme dans des superstitions. Cassirer pense même que la religion ne cherche plus dans le divin la quête de pouvoirs magiques mais la puissance de la vertu. Il nous dit dans l'Essai sur l'homme : "L'homme qui cultive et arrose le sol, plante un arbre ou tue un animal dangereux, accomplit un devoir religieux; il prépare et assure la victoire finale de la puissance du bien, du "sage souverain" sur son adversaire démoniaque. Nous sentons en tout cela l'effort héroïque du genre humain, un effort pour se délivrer de la pression et de la contrainte des forces magiques, un nouvel idéal de liberté. Car ce n'est que grâce à la liberté, par une libre décision, que l'homme, ici, peut entrer en rapport avec le divin. L'homme devient, grâce à cette décision, l'allié du dieu."
4. La religion se différencie du mysticisme
Le mysticisme consiste en la recherche d'une relation intime et immédiate, d'une fusion avec la divinité. La plupart des mystiques se dispensent donc de la médiation d'une institution cléricale afin de favoriser une relation de proximité avec la divinité. La religion pourrait au contraire se définir ainsi que le suggère Jaspers comme dans Philosophie "un rapport à la transcendance devenu objectif dans le culte et dans le savoir traditionnel, lié à une institution ecclésiale et à une autorité".
II - L'opposition religion /raison 1.L'exercice de la raison perçu comme une menace par l'autorité institutionnelle 2-La religion revendique l'irrationnel comme fondement.
1. L'exercice de la raison perçu comme une menace par l'autorité institutionnelle
Toute religion s'établit sur l'autorité institutionnelle et sur le droit exclusif de cette autorité à révéler la vérité, elle peut pervertir la vérité en superstition, pousser à l'intolérance et à la violence. Pour la raison aucune pensée n'est interdite, sacrée. Seule la rigueur et la cohérence sont exigées d'un point de vue rationnel. Socrate a été accusé d'impiété non pas parce qu'il rejetait les dieux de la cité car il les honorait comme tout autre citoyen mais parce qu'il soumet à l'examen critique tout ce qui va guider ses comportements (cf extrait d'Éloge de la Philosophie, de Merleau-Ponty). L'impiété suprême est la confiance de la raison dans la puissance de la pensée libre. La volonté même de rechercher la vérité par les ressources que nous trouvons en nous-mêmes est déjà une atteinte aux dogmes sacrés. Vouloir comprendre ce à quoi l'on croit est déjà un péché d'orgueil. Rechercher des preuves à l'existence de Dieu est une offense faite à l'autorité qui exige la soumission aux dogmes sans examen critique de la raison. La raison conduit cependant Descartes à démontrer l'existence de Dieu : "revenant à examiner l'idée que j'avais d'un Être parfait, je trouvais que l'existence y était comprise, en même façon qu'il est compris en celle d'un triangle que ses trois angles sont compris entre deux droits, ou en celle d'une sphère que toutes ses parties sont également distantes de son centre, ou même encore plus évidemment ; et que par conséquent, il est pour le moins aussi certain que Dieu qui est cet Être parfait, est ou existe, qu'aucune démonstration de géométrie ne saurait être." extrait du Discours de la Méthode, 4ème partie. Vouloir accéder à Dieu par la raison plutôt que par la révélation est perçu comme une atteinte à la religion. Ce serait ainsi que le pense Pascal dans Le Mémorial substituer le "Dieu des philosophes et des savants" au Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob. Le Dieu des philosophes est une figure non religieuse du divin. Pascal n'a pas de mots assez amers pour stigmatiser la réduction de Dieu à un premier moteur, il considère que la philosophie de Descartes ne vaut pas une heure de peine : "je ne puis pardonner à Descartes ; il aurait bien voulu dans toute sa philosophie, pouvoir se passer de Dieu ; mais il n'a pu s'empêcher de lui faire donner une chiquenaude, pour le mettre en mouvement, après cela il n'a plus que faire de Dieu." Pensée 77. Cette menace envers la religion devient plus grande encore quand l'homme par ses découvertes rationnelles entreprend de se rendre maître comme possesseur de la nature selon l'expression de Descartes. Il pourrait concourir lui-même à son salut terrestre en améliorant ses conditions de vie. Cf La vie de Galilée de Berthold Brecht. Réduire la religion à l'obéissance aveugle à un ensemble de dogmes et à l'obscurantisme, n'est-ce pas la transformer en superstition qui s'opposerait à la vraie religion ? Cf Spinoza dans la préface du Traité des autorités théologiques et politiques.
2. La religion (dans son esprit) revendique l'irrationnel comme fondement.
Les religions dites révélées sont dépendantes d'une révélation de la Vérité par des prophètes ou des hommes saints comme Confucius, Bouddha, Moise, le Christ, Mahomet. A la base de la religion, il y a des vérités acceptées dans une confiance absolue. Tertullien va même jusqu'à dire dans la Chair du Christ (V,4) : "credo quia absurdum". Les croyants doivent s'en remettre à ceux à qui la Vérité a été révélée. Ils doivent croire ce que les autres voient. Le croyant a besoin d'un intermédiaire dans sa relation à Dieu. Cette caution est celle du témoin. Les apôtres sont les premiers témoins qui portent la parole dans la religion chrétienne. Le sentiment religieux repose sur une médiation qui nous place dans une dépendance vis à vis d'autrui. La foi ainsi comprise repose sur un assentiment inexplicable et non sur un examen rationnel (cf Hobbes). La croyance qui s'en remet à un témoin devient confiance car il ne s'agit pas tant d'une relation du croyant à Dieu que d'une relation du croyant au prêtre, au rabbin, à l'imam rendant plus floue la limite entre religion et secte. Rousseau critique dans L'Emile en ces termes la religion révélée : "Et comment savez-vous que votre secte est là bonne ? Parce que Dieu l'a dit. Et qui vous a dit que Dieu l'a dit ? Mon pasteur qui le sait bien. Mon pasteur me dit d'ainsi croire, et ainsi je crois". Une démarche rationnelle peut difficilement entretenir un tel rapport à la vérité.
Transition :
La révélation est-elle nécessaire à la vraie foi ? Peut-on concevoir une religion naturelle (par opposition à la religion révélée) qui serait compatible avec la raison ?
III - Une réconciliation possible?1.La religion naturelle 2.La révélation nous enseigne de développer notre raison La religion comme représentation du rationnel du philosophe
1. La religion naturelle
La religion naturelle postule que la représentation que l'on se fera de Dieu sera d'autant plus véridique qu'on ressentira comme de façon innée, sa présence immanente dans la nature humaine indépendamment de toute révélation, de toute église et de tout dogme. Dieu est perçu comme un Être suprême, unique, commun à tous les hommes, créateur et conservateur de l'ordre du monde. Rousseau définit ainsi sa religion naturelle : "Je crois que le monde est gouverné par une volonté puissante et sage; je le vois ou plutôt je le sens, et cela m'importe à savoir. Mais ce monde est-il éternel ou créé ? Y a-t-il un principe unique des choses ? Y en a-t-il deux ou plusieurs ? Et quelle est leur nature ? Je n'en sais rien et que m'importe". Ramener Dieu au sentiment d'un principe créateur, d'une transcendance rattachée à aucune institution n'est-ce pas une forme d'athéisme déguisée ? N'y a-t-il aucun rencontre possible entre la religion comme telle et la raison ?
2. La révélation nous enseigne de développer notre raison
Averroès nous invite à envisager la révélation comme une invitation au développement rationnel :"Puisque donc est bien établi que la Révélation déclare obligatoire l'examen étants au moyen de la raison et de la réflexion sur ceux-ci, et que par ailleurs, réfléchir n'est rien d'autre qu'inférer, extraire l'inconnu du connu -ce en quoi consiste le syllogisme, ou qui s'opère au moyen de lui-, alors nous avons l'obligation de recourir au syllogisme rationnel pour l'examen des étants." Discours décisif où l'on établit la connexion entre la Révélation et la philosophie. Il n'y a qu'une seule vérité mais de multiples expressions possibles, le Coran nous commande de nous servir de notre raison si nous le pouvons. La loi divine possède un sens extérieur et un sens intérieur à cause de la diversité qui existe dans le naturel des hommes. La grande masse sensible seulement au sens extérieur est incapable d'interprétation du texte sacré. Si l'on nous dit que Dieu est lumière, il faut laisser le vulgaire le contempler comme on le fait du soleil. Le philosophe ne saurait se contenter du sens extérieur et des métaphores. Il a besoin d'interpréter de façon certaine par démonstration le sens extérieur pour délivrer le sens intérieur. L'enfer et le paradis ne sont que des images figurant les châtiments et les récompenses purement spirituels des événements de l'âme liés au degrés de perfection acquis par l'intelligence et les mœurs.
3. La raison prépare le champ à la foi d'une double façon.
La raison se développe dans deux domaines différents pour Kant, d'un point de vue théorique et d'un point de vue pratique. La raison théorique recherche la connaissance des phénomènes et obéit au principe de raison suffisante. Remonter jusqu'à une cause première elle-même non causée est un désir rationnel légitime que la raison théorique exprime. L'existence d'un premier principe non démontrable mais rationnellement possible et souhaitable est donnée à la raison théorique par la foi, il s'agit de Dieu comme premier moteur de toute création. La raison pratique vise la moralité des actions, et obéit à l'impératif catégorique qui nous enjoint de ne jamais traiter autrui seulement comme un moyen de mon plaisir ou de mon intérêt mais comme une fin en soi à savoir une personne qui a une valeur en elle, une dignité parce qu'elle-même est aussi capable d'exiger d'elle cet impératif (loi morale). Il est moralement nécessaire d'admettre l'existence de Dieu afin de pouvoir penser la réconciliation de la morale et du bonheur. Leur dissociation crée un sentiment d'injustice que la religion apaise par une réparation dans l'au-delà. La religion chrétienne est une religion naturelle en accord avec ce que la raison pratique prescrit. Elle illustre de façon figurée des exigences rationnelles d'un point de vue pratique. La morale conduit à la religion. L'idée de l'existence de Dieu est une exigence de la Raison pratique, un postulat rendu nécessaire subjectivement, sur le plan de l'action. Cf texte de Kant dans la Religion dans les limites de la Raison.
4. La religion comme représentation du rationnel et du vrai que le philosophe pense.
La philosophie ne s'oppose pas à la religion, elle la comprend, c'est l'entendement (que Hegel différencie de la Raison) revendiqué par les philosophes des Lumières qui s'oppose à la religion. En effet, l'entendement établit des oppositions et relève les différences; la Raison est capable de dialectique à savoir qu'elle sait dépasser les oppositions pour les comprendre comme des moments d'une même essence. La religion et la philosophie ont un objet commun: le vrai en soi et pour soi. La religion opère la réconciliation du fini et de l'infini au travers du recueillement alors que la philosophie le fait au travers de la pensée. "Le recueillement est le sentiment de l'unité du divin et de l'humain, mais un sentiment qui pense; dans l'expression recueillement est déjà contenu le penser." Le philosophie est un penser pur. La religion s'appuie sur des images, elle pense avec l'imagination. Ceci permet aussi à la religion d'être comprise d'un large public. Elle est une pensée impure. Hegel accorde à la fois le statut d'une intériorité spirituelle à condition de ne pas la limiter à une croyance naïve à des récits de miracles. La lettre du récit doit s'effacer devant son sens spirituel. Le récit des miracles est un support narratif pour figurer des vérités existentielles.
5. La foi sensible au cœur et non à la raison
Penser la religion comme une présentation impure de l'esprit, n'est-ce pas manquer sa spécificité ? La foi ne doit-elle pas prioritairement être sensible au cœur et non à la raison ? Notre rapport à Dieu n'est religieux que dans la mesure même de l'absence de Dieu, de sa non manifestation. L'écriture dit Pascal, dit que "Dieu est un Dieu caché" Pensées 242, un Dieu que l'aveuglement des hommes ne mérite pas. Il ne se manifeste que parcimonieusement. C'est parce que sa présence est incertaine que la question est tragique. Le pari pascalien n'est pas un choix : "il faut parier. Ce n'est pas volontaire : vous êtes embarqué" Pensées 233. Puisque la raison n'est pas en position de décider de l'existence de Dieu, ce n'est pas à elle que Dieu s'adresse mais au cœur : "C'est le cœur qui sent et non la raison. Voilà ce qu'est la foi : Dieu sensible au cœur et non à la raison" Pensées 278. Le cœur est chez Pascal cette intériorité que seul Dieu peut sonder et qui est en amont de toute raison. Le manque de preuves ne nuit pas à la foi des chrétiens, bien au contraire : "vous vous plaigniez de ce qu'il ne la prouve pas ! S'ils la prouvaient, ils ne tiendraient pas parole, c'est en manquant de preuves qu'il ne manquent pas de sens.". On peut dire de Pascal qu'il est fidéiste c'est à dire qu'il pense que la foi se suffit à elle-même, il rejette toute justification rationnelle des dogmes et s'oppose au rationalisme religieux ou philosophique. La position fidéiste rend le mieux compte de l'expérience religieuse.
Transition :
Toutefois si la religion est d'abord une expérience intérieur, existentielle, une affaire privée, nul ne peut l'imposer à un autre ou l'exiger d'un autre. Seule la tolérance peut être de mise en la matière. Pourquoi la religion a-t-elle déchaîné tant de critiques ? N'est-ce pas parce qu'elle a été perçue comme une illusion aliénante qui dépossédait l'homme au profit de Dieu qui n'est peut-être que le miroir idéalisé de l'homme ? L'homme n'aurait-il finalement pas affaire qu'à lui-même dans la religion ?
IV - L'homme n'a-t-il affaire qu'à lui-même dans la religion ? 1. L'homme n'a affaire qu'à lui-même dans la religion (Marx) -illusion nourrie par le désir humain (Cf Freud) -Nietzsche
L'homme n'a-t-il affaire qu'à lui-même dans la religion ?
1. L'homme n'a affaire qu'à lui-même dans la religion (Marx)
Pour se représenter les pouvoirs de l'espèce humaine, l'homme les projette sur une substance infinie étrangère à lui. Pour pouvoir penser ses attributs au niveau de l'espèce, l'homme construit un Dieu à son image. Dieu est en quelque sorte le miroir de l'homme cf texte de Feuerbach dans L'Essence du Christianisme. L'homme rend un culte au Dieu dans lequel il se reconnaît le mieux, par exemple les grecs vénèrent Apollon et Athéna en qui ils trouvent magnifiés leur propres qualités à savoir la beauté artistique et la raison philosophique. Ce transfert n'est pas sans danger car pour enrichir Dieu, l'homme doit se faire pauvre car l'homme affirme en Dieu ce qu'il nie en lui. En ce sens, la religion est une aliénation de l'homme au sens où il a abandonné sa propre propriété à autrui. Il faut désormais que l'homme se réapproprie ce qu'il a confié à la religion. Telle est la critique qu'effectue Feuerbach dans les Manifestes Philosophiques de la religion et que Marx reprendra à son compte. Ainsi Marx dit-il dans la Critique de la Philosophie du Droit de Hegel : "La religion n'est que le soleil illusoire qui gravite autour de l'homme, tant que l'homme ne gravite pas autour de lui-même." Pour Marx si l'homme cherche hors de lui la réalité qui lui manque, c'est parce qu'il vit dans une société où règne l'exploitation de l'homme par l'homme et qu'il est appauvri. Pour Feuerbach, l'appauvrissement de l'homme est le résultat de l'aliénation religieuse alors que pour Marx, c'est l'appauvrissement de l'homme par l'exploitation sociale qui est la cause de l'aliénation religieuse car "Renoncer aux illusions religieuses sur sa situation, c'est déjà commencer à renoncer à la situation qui a besoin d'illusion.". La religion est l'opium du peuple, elle est le symptôme d'une maladie, celle de la société qui rend l'homme malade.
2. La religion comme illusion nourrie par le désir humain (Cf Freud)
L'édification d'un créateur d'une intelligence supérieure et d'une bonté protectrice n'est pas une simple erreur mais une illusion où le désir humain a sa part. Elle relève d'un investissement psychologique, elle exprime ce que nous voudrions voir vrai (cf Freud). La religion est définie comme névrose c'est-à-dire comme l'expression d'un conflit intérieur, un compromis entre nos désirs inconscients et nos aspirations conscientes. Elle est pensée sur le modèle de la névrose individuelle liée à la relation de l'enfant au père, il s'agit ici de la relation de l'humanité à Dieu dont la névrose religieuse serait une étape de la croissance tendant à disparaître une fois l'humanité parvenue à l'âge adulte. Une fois dépassées nos peurs infantiles souvent entretenues par la religion, nous pourrons dépasser ce besoin d'être contraints et protégés par une autorité supérieure.
3. La fin de la religion : une illusion plus grande encore. (cf Nietzsche)
La provocation de Nietzsche est frappante : "le plus grand des événements récents -la mort de Dieu, le fait autrement dit que la foi dans le Dieu chrétien a été dépouillée de sa plausibilité- commence à jeter ses premières ombres sur l'Europe". "Dieu est mort" (formule chrétienne chantée dans un cantique de Bach) résume l'effondrement de toutes les valeurs transmises depuis l'antiquité. Dieu étant immortel, de quoi Dieu est-il la métaphore ? Dieu symbolise le référent idéal, la cause physique première et le garant moral, le monde suprasensible, le domaine des Idées et des Idéaux. Avec la mort de Dieu, est-ce la fin des repères moraux transcendants ? Du sentiment de pêché ? Avec la fin de la religion, est-ce la fin de la morale ? Ne peut-on concevoir la morale indépendamment de la religion ? A moins que la recherche de repères transcendants que nous inventons même de façon athée n'ait encore quelque chose de religieux ? Tout le monde ne peut être un funambule dansant sur des cordes légères au dessus du vide. La pire ne peut-il arriver si des valeurs idéologiques sans garde-fou moral ne s'emparent de la place occupée par la religion ? Comme le dit Nietzsche dans le paragraphe 33 du Gai Savoir :" l'événement est en soi beaucoup trop considérable, trop lointain, trop au-delà de la faculté conceptuelle du grand nombre pour que l'on puisse prétendre que la nouvelle en soit déjà parvenue, bien moins encore, que d'aucuns se rendent compte de ce qui s'est réellement passé, comme de tout ce qui doit désormais s'effondrer, une fois ruinée cette croyance, pour avoir été fondée sur elle, et pour ainsi dire enchevêtrée en elle : par exemple notre morale dans sa totalité." Serons-nous à la hauteur de cette place laissée à l'inventivité humaine ?
4. Les résurgences du religieux refoulé (Mircéa Eliade)
A en croire Mircea Eliade : " la majorité des <<sans>> se comportent encore religieusement à leur insu [...] l'homme moderne qui se sent et se prétend areligieux dispose encore de toute une mythologie camouflée et de nombreux ritualismes dégradés.". C'est le cas lors de la fête du nouvel an, de la pendaison de crémaillère, de l'obtention d'un nouvel emploi ou d'une promotion sociale mais aussi lors d'un mariage ou de la naissance d'un enfant. Ces événements impliquent une solennité que ne sait pas leur conférer le domaine areligieux. L'homme profane est le descendant de l'homme religieux, il a intégré son histoire religieuse dans son inconscient. C'est en lui que l'homme puise pour chercher des solutions aux difficultés de sa propre existence et dans ce sens l'inconscient remplit le rôle de la religion. En l'homme gît la possibilité de réintégrer une expérience religieuse. Ce n'est pas la croyance en un Dieu qui définit la religion dans son essence mais l'attitude religieuse qui suppose certaines valeurs transcendants la vie elle-même. On peut donc être ainsi que le dit Einstein un incroyant profondément religieux. Une humanité libérée de tout sentiment religieux serait comme l'explique Nietzsche un symptôme du nihilisme, elle exprimerait la dévalorisation de toutes les valeurs. Il faudra réinventer du sacré. On comprend mieux alors pourquoi les Révolutionnaires français alors même qu'ils saccageaient les églises et pourchassaient le clergé, éprouvaient par ailleurs le besoin de fonder une religion civile avec son culte de l'Être suprême, ses rituels, ses cérémonies.
Conclusion et ouverture :
L'existence humaine est pensable sans Dieu, Dieu peut n'être qu'une invention du désir humain. Tout sentiment religieux ne s'arrête pas au divin, l'essence de la religion se manifeste dans la distinction du sacré et du profane, dans la relation à ce qui est hors de moi et pourtant constitutif de moi-même. L'homme est essentiellement un pont vers ce qui le dépasse. Certes dans la religion, il n'a affaire qu'à lui-même mais il est lui-même constitué d'un rapport à l'éternité, à l'infini et lorsque l'homme part à la recherche de lui-même, il ne peut faire l'impasse d'une dimension qui le transcende et dont il procède. Comme le dit Kierkegaard, dans La Maladie à la mort : "le moi de l'homme est un rapport ainsi posé par dérivation qui se rapporte à lui-même et, se rapportant à lui-même se rapporte à autre chose.". Le rapport au religieux peut être occulté, il ne peut être dépassé ; l'illusion qui nous le ferait croire nous y ramènerait plus fortement à notre insu et de façon plus irrationnelle encore. La recherche d'un sens existentiel transcendant la vie elle-même relève du religieux ; ce dernier s'affirme explicitement dans les religions, implicitement par exemple dans l'idée de progrès rationnel, social, politique. La lutte politique ne constitue-t-elle pas pour Marx une nouvelle foi ?
Voici les sujets qui pourraient être traités grâce à la réflexion sur le thème de la religion :
Problématiser un concept :
- La foi doit elle primer sur la raison?
- Plan dialectique possible pour ce sujet
- Proposition de plan : thème de la religion, séquence "culture"
- Thèse : certaines vérités relatives à Dieu ne peuvent être connues que par la foi
- antithèse : les vérités qui ne sont pas rationnellment démontrables ne méritent pas de crédit
- Croire est ce renoncer à l'usage de la raison?
- Plan dialectique proposé :
- Thèse : la foi est contraire à la raison en tant qu'elle n'est que superstition
- Antithèse : Foi et raison ne sont pas incompatibles pour les philosophes rationalistes.
La critique du christianisme et vocabulaire. Fiche bac synthèse
Ce concept de religion vient du latin, religio; la religion nous renvoie à la piété qui relie les hommes à la divinité et pratique rituelle institutionnalisée. C’est en fait un ensemble de croyances et de rites comprenant un aspect subjectif, la foi par exemple et un aspect objectif, les cérémonies, les institutions. Il faut souligner les caractéristiques de la religion qui sont la diversité et l’universalité. En effet, la religion est inhérente à toutes les sociétés. Dans un premier temps, le terme s’applique à la religion chrétienne, ensuite, le terme s’est élargi à toute manifestation de la vie où l’on remarque une certaine ritualité et croyance. La religion est généralement associée au sacré et s’oppose au profane. Cette dualité se retrouve chez Durkheim qui l’appelle, «?la forme élémentaire de la vie religieuse?». Nous pouvons nous demander en quoi consiste l’expérience du sacré. Le sacré nous conduit à une transcendance, ainsi nous pouvons dire que la religiosité est l’expression du sentiment de l’homme face à sa finitude et de sa dépendance face à une puissance qui le dépasse, cette attitude s’appelle la foi. Le fidèle s’en remet à Dieu car il connaît sa finitude et se sent impuissant face à la toute puissance divine, la nature naturante comme le dirait Spinoza. L’acte de foi se rapporte donc à des vérités relatives à l’au-delà, et plus particulièrement au-delà de ce que la raison peut comprendre, peut-être la religion commence t’elle là où la raison finit. Nous pouvons faire référence à l’ordre du cœur pascalien; en effet il pose un nouvel ordre de connaissance, à la raison s’ajoute le cœur, la religion relève de ce dernier ordre de connaissance. Les vérités qui se situent au-delà de la raison sont celles de la révélation. Il semblerait donc que la religion se fonde sur la faiblesse de la raison. La religion dépasse l’entendement. Nous ne pouvons pas de ce fait rationaliser les vérités révélées, cela serait un acte non religieux. La foi doit rester une conviction profonde qui engage l’individu et demande son adhésion totale au mystère indéchiffrable. Nous pouvons ainsi parler d’une véritable expérience religieuse.
Critique du christianisme
Nietzsche et Feuerbach
Selon Nietzsche, les esclaves, les vaincus ont inventé l’au-delà pour compenser leur misère. Ils ont imaginé de fausses valeurs pour se consoler. Dieu est perçu comme une consolation, une compensation. Les hommes ont forgé le mythe du salut de l’âme et la fiction du péché. C’est une religion superstitieuse, c’est l’arme des faibles.
Selon Feuerbach, l’homme projette dans le ciel, le rêve de justice qu’il ne peut réaliser sur la terre. Justice, amour, sagesse sont les attributs de la conscience humaine représentant l’idéal humain. Dieu est un substitut des valeurs humaines déçues ainsi que le suggère la citation, «?l’homme pauvre possède un Dieu riche?». Dieu est perçu dès lors comme une projection imaginaire. Nier Dieu pour Feuerbach comme pour Nietzsche, c’est reprendre possession de sa vie. Il en est de même pour Karl Marx pour qui «?la religion est l’opium du peuple?».
Dieu cause du monde
Nécessité d’une cause première
Il est nécessaire de poser une cause première sinon il y aurait une régression à l’infini. Dieu est la cause ultime des phénomènes. Il est le premier moteur de l’univers; l’univers est contingent, il n’a pas en lui-même sa raison d’être donc Dieu est l’être nécessaire. C’est l’argument de la preuve de l’existence de Dieu par la causalité ou encore l’argument téléologique, ou par la finalité.
L’univers n’a pas sa raison d’être, il est contingent ce qui rend Dieu nécessaire. C’est l’argument de la preuve de Dieu par la causalité ou l’argument téléologique. On peut objecter à cet argument l’existence du mal sur terre, Dieu est tout puissant et pourtant le mal existe. La solution au problème du mal est la suivante : le Mal est la faute de l’homme. Le mal trouve sa justification dans le péché originel et la souffrance n’est que la réédition de ce péché. Les hommes supportent le poids de cette faute et sont coupable. Par conséquent même l’innocent est frappé par le malheur.
Objection à cet argument
Le monde est organisé selon un plan; cet ordre est juste et bon. Le problème est celui de la justification du mal car il y a désordre, injustices et souffrances. Le problème du mal est posé comme un dilemme. Dieu est tout puissant donc il aurait pu éliminer le mal. Il ne l’a pas fait, il n’est pas de toute bonté.
La solution est la suivante : le mal est la faute de l’homme. Pascal affirme qu’il y a justification du mal dans le péché originel. La souffrance est la réédition de ce péché. D’après la bible, le péché d’Adam a troublé l’harmonie du monde celle de la primitive création; nous fils d’Adam, nous supportons le poids de cette faute. Donc, les hommes sont les héritiers de cette faute primitive. Nous naissons coupables; c’Est-ce qui explique que même l’innocent soit frappé. le problème du mal ne se pose pas de ce point de vue pour les athées, Stendhal disait, «?la seule excuse de Dieu est qu’il n’existe pas?».
Argument ontologique de la preuve de l’existence de Dieu
Descartes
Dans la cinquième méditation, Descartes va déduire Dieu à partir de l’idée de Dieu. J’ai l’idée d’un être parfait or l’homme est incapable de perfection; douter c’est reconnaître ses limites donc un homme ne peut être parfait. La perfection appartient à Dieu. Donc, si la perfection existe, Dieu existe; l’idée de l’être parfait implique l’idée de l’existence de l’être parfait.
L’idée de Dieu :
Le terme de Dieu recouvre les croyances les plus diverses.
1. Le Théisme : Le théisme se rapporte à la religion juive, chrétienne et musulmane. Il renvoie à l’idée que Dieu est le créateur de l’univers. Nous avons un Dieu qui est transcendant au monde crée. C’est une conception issue de la bible. Il est la source de tout ce qui existe, l’être parfait, tout puissant et infini.
2. Le panthéisme :
PAN : tout THEOS : DIEU Il ne faut pas distinguer Dieu du monde. Dieu n’est pas le créateur du monde cela signifie qu’il n’est pas transcendant au monde bien au contraire, il se confond avec lui. La conséquence est la suivante = Dieu ne serait pas la Totalité, l’infini, ce qui est impossible. L’univers est en Dieu et non hors de lui. Dieu est immanent à l’univers. Pour reprendre les mots de Spinoza, Dieu est nature naturante tandis que l’homme est nature naturée: mode fini de la substance infinie.
3. L’athéisme :
L’athéisme se définit par la négation complète de Dieu. On suppose que Dieu n’a pas crée le monde, Dieu n’est pas transcendant par opposition au théisme, Dieu n’est pas non plus immanent par opposition au panthéisme. Aucune cause créatrice ne peut rendre compte de la matière. Il nous faut donc poser une matière éternelle qui n’a ni commencement, ni fin. La matière en mouvement permet à elle seule de rendre compte des phénomènes. Ex : Le Marxisme.
4. L’agnosticisme :
Les agnostiques considèrent qu’on ne peut se faire aucune idée de Dieu. On ne peut pas savoir s’il existe ou pas par conséquent, l’univers reste mystérieux et incompréhensible.
Entraînez-vous
Toute croyance est-elle contraire à la raison ?
Elaboration d'un plan dialectique
Sujet :
Croire est ce renoncer à l'usage de la raison?
Position du problème
Croire est-ce renoncer à la raison ? La foi s'affirme comme le contraire de la raison puisqu'elle n'est que superstition ce qui nous amène à penser que le fait de croire serait contraire à notre raison. Cependant, pour les philosophes rationalistes, foi et raison ne seraient pas totalement incompatibles. Nous faut-il privilégier la foi pour renoncer à la raison ou cette dernière peut-elle se concilier avec la foi ?
Plan dialectique proposé :
Thèse :
la foi est contraire à la raison en tant qu'elle n'est que superstition
Antithèse :
Foi et raison ne sont pas incompatibles pour les philosophes rationalistes.
Anayse du sujet :
Pour le croyant, la raison ne peut pas saisir le mystère de la foi. Pour les philosophes des lumières, la religion est contraire à la raison et relève de la superstition
1 - La foi véritable suppose l'abandon de la raison
pour Pascal, la foi ne peut résulter que d'un renoncement aux prétentions de la raison, "le coeur a ses raisons que la raison ne connait pas"
2 - La religion révélée n'est au fond qu'une simple superstition
Spinoza, Voltaire et Hume critiquent la religion révélée car elle est contraire à la raison. Les dogmes de la religion chrétienne sont considérés comme des superstitions qui ne résistent pas à un examen critique. Le conflit entre religion et raison se fait d'autant plus sentir dans le ldomaine de la science qui entre en conflit avec la version biblique de l'histoire du monde au 19ème siècle.
3 - La religion est comparable à l'opium qui étourdit les esprit
Marx dit de la religion qu'elle est "l'opium du peuple", une illusion qui empêche les masses de réfléchir et de prendre conscience de leur servitude. les philosophes de l'absurde constatent l'impuissance de la raison à donner un sens à la vie tout en refusant d'accomplir le saut dans la foi.
Antithèse :
1 - La réconciliation de la foi et de la raison
Avec Saint Augustin, les docteur de l'église se sont réconciliés avec la foi et la raison. Saint Augustin disait que la raison confirme ce que la foi nous révèle. L'argument ontologique de Saint Anselme sera repris par Descartes : bien qu'étant un être fini, je puis concevoir l'idée d'un Dieu parfait et infini. Comme le fini ne peut pas contenir l'infini, c'est que cette idée m'a été donnée par Dieu, donc Dieu existe.
2 - Il existe une religion naturelle conforme à la raison
Hume et les philosophes des lumières pensent qu'il existe une "religion naturelle" qui est conforme à la raison. Le déisme pose comme certain qu'un dessein divin, une intelligence supérieure se manifestent dans l'ordre et la beauté de la nature
3 - Dieu est le postulat sur lequel se fonde la raison morale
Kant va plus loin dans l'affirmation d'un lien entre la religion et la raison. L'existence de Dieu est pour lui un postulat de la raison pratique, celle qui se préoccupe de la loi morale. Dieu n'est pas seulement un créateur : il est une condition sans laquelle les exigences morales perdent leur sens.
Ainsi poser la raison dans une totale opposition à la foi sous prétexte qu'elle n'est que superstition n'est pas un argument suffisant car, comme nous l'avons vu avec Kant, Hume, Saint Augustin, Descartes et Saint Anselme, la foi peut aussi se réconcilier avec la raison. La religion n'exclut pas toujours cet ordre de connaissance avec lequel elle est se trouve confondue si l'on se réfère à l'argument déiste.
Citations pour le devoir :
" La religion représente l'esprit absolu non seulement pour l'intuition et la représentation mais aussi pour la pensée et la connaissance"
Hegel
"Il y a dans la religion quelque chose d'éternel qui est destiné à survivre à tous les symboles particuliers dans lesquels la pensée religieuse s'et successivement enveloppée"
Emile Durkheim
"La religion est l'opium du peuple" Marx
Toute croyance est-elle irrationnelle?
Plan possible de la dissertation
I - L’exigence de raison n’est pas compatible avec les différentes formes de croyances
- La raison critique de la croyance -
1 - Les croyances diverses s’opposent au savoir car elles sont insuffisamment fondées.
2 - La croyance : un obstacle à une recherche commune : la vérité
3 - Hétéronomie de la croyance
II - Toutes les croyances ne sont pas irrationnelles
- Distinction des différentes croyances en rapport avec les exigences de notre raison
1 - Révision de l’affirmation : toutes les croyances sont irrationnelles
2 - La vérité de foi
3 - La foi : un nouvel ordre de connaissance plus sensible au cœur que la raison. Le pari Pascalien.
III - Notre raison est-elle à l’origine de certaines croyances?
1 - La foi : conséquence de la raison selon Hume
2 - La religion naturelle
3 - La raison prépare le champ à la foi : Kant
?
Toute croyance est-elle irrationnelle?
La croyance est selon le sens commun une attitude irrationnelle et donc contraire à la raison. Les croyances religieuses ou les superstitions sont des croyances au même titre que le miracle. Il semblerait donc que la croyance soit de nature opposée à la raison soit parce qu’elle est un pseudo-savoir soit parce qu’elle renvoie à un savoir non fondé et donc douteux, susceptible d’être remis en question.
Dans tous les cas de figure la croyance, superstition ou opinion est toujours incapable de rendre compte d’elle-même.
Mais toute croyance est-elle irrationnelle pour autant? Peut-on considérer que les croyances soient irrationnelles parce qu’elles s’opposent à la raison ou manquent de fondement, de raisons suffisantes pour y adhérer? Toutes les croyances sont-elles irrationnelles, ne faut-il pas les distinguer en rapport avec les exigences de notre raison?
?
I - La croyance insuffisamment fondée s’oppose au savoir L’exigence de raison n’est pas compatible avec les différentes formes de croyances - La raison critique de la croyance -
Si l’on se réfère à la définition de la croyance nous pourrons justifier l’irrationalité de la croyance. La croyance en tant qu’opinion, croire quelque chose n’est que plus ou moins vraie donc probable car non fondée au niveau objectif, on ne fait dans le cas d’une opinion qu’émettre son assentiment. Elle s’opposerait donc au savoir. Mais n’y a t’-il pas pour autant des degrés de croyance?
Si notre opinion est douteuse, superstition, illusion, il n’y a aucune garantie objective, si nous formulons des conjectures, des prévisions, la croyance est susceptible d’être vraie à condition d’une vérification comme dans le cas des hypothèses scientifiques : si notre croyance s’apparente davantage à une conviction elle n’a pas plus de fondement objectif, pas plus que la foi qui n’est qu’une certitude non justifiée d’un point de vue objectif. Les croyances diverses reposent donc sur un sentiment subjectif avec des degrés très variables au niveau de la certitude. De ce fait n’étant jamais vraiment fondées du point de vue objectif, les croyances sont donc irrationnelles car assimilées à un pseudo-savoir ou au mieux, à un savoir non fondé. Nous dirons donc avec Descartes que ce qui est probable est faux. En matière de croyance, chacun est juge de sa vérité, la croyance devient pour elle-même sa propre confirmation : «?je crois que cela est vrai?», pourquoi? «?parce que je le crois?». La vérité serait une simple affaire de jugement, à chacun sa vérité, à chacun sa croyance, une vérité qui serait synonyme de relativité.
La croyance serait un obstacle à une recherche commune de vérité. Nous pouvons citer à cet égard la formule du sophiste Protagoras «? l’homme est la mesure de toutes choses?», « telle une chose t’apparaît ; telle est pour toi. Telle elle m’apparaît, telle elle est pour moi » : l’homme serait donc enfermé dans ses croyances. Le solipsisme est incompatible avec l’exercice de la raison et la quête d’une vérité universellement intelligible. Au lieu d’adhérer spontanément aux croyances qui sont les nôtres le sujet devrait suspendre son jugement et ses certitudes afin de se remettre en question. Le croyant semble aveuglé par sa croyance et indifférent à toute exigence sceptique de remise en cause de ses certitudes immédiates non fondées.
La croyance et la raison semble s’exclure du fait de l’irrationalité des croyances qui ne s’accordent pas avec l’exigence de faire table rase de tout ce que nous croyons. L’étonnement doit être à la base de la quête de vérité ainsi que l’exige Socrate et son adage : il cherche à savoir plutôt qu’il ne croit savoir. Le questionnement devient un passage obligatoire pour fonder nos idées ainsi que le prouve l’ironie socratique or, la croyance n’est qu’une adhésion spontanée de notre jugement à une idée. Il faut au contraire repousser toute évidence si celle-ci n’a pas fait l’objet d’un questionnement critique. La croyance plonge l’homme dans un confort au point qu’il confond la vérité et ce qu’il croit bien connaître. L’esprit doit se faire violence pour entrevoir la vérité, il faut donc s’exercer en premier lieu sur nos croyances, nos certitudes immédiates : de ce fait, les croyances sont bien irrationnelles puisqu’elles sont le signe d’une simple certitude admise sans retour sur elle-même, sans esprit critique. La raison est autonome, elle fait retour sur elle et cherche un fondement à ses propres idées tandis que les croyances n’ont aucune autonomie, on peut au contraire parler d’hétéronomie de la croyance car elle méconnait son origine. La recherche du premier fondement pour la connaissance selon Descartes suppose que l’on se libère de toutes nos croyances préalables et communément admises. La contingence et la relativité des croyances qui ont une origine accidentelle entrent à ce stade en opposition avec la nécessité et l’universalité de la vérité fondée en raison.
Les croyances seraient donc irrationnelles par leur irréversible relativité, contingence et donc en ce sens rejetées par la raison qui cherche une vérité nécessaire, universelle, non dogmatique et toujours mise à l’épreuve de la contradiction.
Cependant toutes les croyances sont-elles irrationnelles? Sont-elles toutes à l’image de la contingence, de la relativité des opinions sur le moule d’un fondement accidentel et donc en totale opposition et contradiction avec la raison ou devons-nous admettre que certaines de nos croyances peuvent nous conduire à une vérité objective au même titre que la raison?
II - Toutes les croyances ne sont pas irrationnelles
- Distinction des différentes formes de croyances en rapport avec les exigences de notre raison -
Il nous faudrait donc relativiser notre affirmation préalable selon laquelle toute croyance serait irrationnelle. En effet, toutes les croyances n’ont pas le même sens. En disant, «?je crois que je vais réussir mon examen?», «?je crois qu’il va neiger demain?» et «?je crois en la fraternité «, j’avance une probabilité dans le premier cas qui domine par son aspect hypothétique et un jugement qui vaut un postulat dans le second cas. Le jugement se prête parfois à la critique, à l’examen mais la croyance reste première cependant elle ne s’oppose pas toujours à un examen à venir et approfondi de la raison pour y trouver une certitude plus fondée parfois au contraire la croyance refuse la contradiction et la critique pour rester sans fondement assuré. Le préjugé est un «?acte de tenir pour vrai?» ainsi que le dit Kant dont l’incertitude est autant subjective qu’objective tandis que la foi est «?un acte de tenir pour vrai?» dont la certitude est subjective. Le préjugé refuse l’examen de la raison mais concernant la foi, nous avons une vérité d’un autre ordre : Les religions dites révélées sont dépendantes d'une révélation de la Vérité par des prophètes ou des hommes saints comme Confucius, Bouddha, Moise, le Christ, Mahomet. A la base de la religion, il y a des vérités acceptées dans une confiance absolue. Tertullien va même jusqu'à dire dans la Chair du Christ (V,4) : "credo quia absurdum". Les croyants doivent s'en remettre à ceux à qui la Vérité a été révélée. Ils doivent croire ce que les autres voient. Le croyant a besoin d'un intermédiaire dans sa relation à Dieu. Cette caution est celle du témoin. Les apôtres sont les premiers témoins qui portent la parole dans la religion chrétienne. Le sentiment religieux repose sur une médiation qui nous place dans une dépendance vis à vis d'autrui. La foi ainsi comprise repose sur un assentiment inexplicable et non sur un examen rationnel (cf. Hobbes). La croyance qui s'en remet à un témoin devient confiance car il ne s'agit pas tant d'une relation du croyant à Dieu que d'une relation du croyant au prêtre, au rabbin, à l'imam rendant plus floue la limite entre religion et secte. Rousseau critique dans L'Emile en ces termes la religion révélée : "Et comment savez-vous que votre secte est là bonne ? Parce que Dieu l'a dit. Et qui vous a dit que Dieu l'a dit ? Mon pasteur qui le sait bien. Mon pasteur me dit d'ainsi croire, et ainsi je crois". Tel est ce qui fonde le paradoxe de la foi, le croyant ne refuse par l’usage de la raison mais interprète les objections de la raison comme les signes qui manifestent la transcendance de la vérité.
La foi ne doit-elle pas prioritairement être sensible au cœur et non à la raison ? Notre rapport à Dieu n'est religieux que dans la mesure même de l'absence de Dieu, de sa non manifestation. L'écriture dit Pascal, dit que "Dieu est un Dieu caché" Pensées 242, un Dieu que l'aveuglement des hommes ne mérite pas. Il ne se manifeste que parcimonieusement. C'est parce que sa présence est incertaine que la question est tragique. Le pari pascalien n'est pas un choix : "il faut parier. Ce n'est pas volontaire : vous êtes embarqué" Pensées 233. Puisque la raison n'est pas en position de décider de l'existence de Dieu, ce n'est pas à elle que Dieu s'adresse mais au cœur : "C'est le cœur qui sent et non la raison. Voilà ce qu'est la foi : Dieu sensible au cœur et non à la raison" Pensées 278. Le cœur est chez Pascal cette intériorité que seul Dieu peut sonder et qui est en amont de toute raison. Le manque de preuves ne nuit pas à la foi des chrétiens, bien au contraire : "vous vous plaigniez de ce qu'il ne la prouve pas ! S'ils la prouvaient, ils ne tiendraient pas parole, c'est en manquant de preuves qu'il ne manquent pas de sens.". On peut dire de Pascal qu'il est fidéiste c'est à dire qu'il pense que la foi se suffit à elle-même, il rejette toute justification rationnelle des dogmes et s'oppose au rationalisme religieux ou philosophique.
Ainsi la vérité de foi tout en s’opposant à la vérité rationnellement fondée nécessite l’expérience du sujet comme sa condition sans pour autant s’élever à l’universalité. La raison elle-même n’est-elle pas à l’origine de certaines croyances?
III - Notre raison est-elle à l’origine de certaines croyances?
Si l’on se réfère au philosophe Hume, nous pouvons affirmer que la croyance en Dieu vient d’une illusion naturelle qui est liée à notre raison. Cette dernière serait attachée à un principe de causalité qui conduirait l’homme à penser que tout évènement est l’effet d’une cause extérieure et cela ne serait que l’expression de l’habitude. De deux évènements, nous pensons que l’un à le principe actif de réalisation de l’autre ainsi l’univers est pensé comme l’effet d’une cause antécédente : Dieu. Dans ce cas de figure la foi n’est plus irrationnelle mais la conséquence de l’usage de la raison elle-même.
La religion naturelle postule que la représentation que l'on se fera de Dieu sera d'autant plus véridique qu'on ressentira comme de façon innée, sa présence immanente dans la nature humaine indépendamment de toute révélation, de toute église et de tout dogme. Dieu est perçu comme un Être suprême, unique, commun à tous les hommes, créateur et conservateur de l'ordre du monde. Rousseau définit ainsi sa religion naturelle : "Je crois que le monde est gouverné par une volonté puissante et sage; je le vois ou plutôt je le sens, et cela m'importe à savoir. Mais ce monde est-il éternel ou créé ? Y a-t-il un principe unique des choses ? Y en a-t-il deux ou plusieurs ? Et quelle est leur nature ? Je n'en sais rien et que m'importe".
La raison se développe dans deux domaines différents pour Kant, d'un point de vue théorique et d'un point de vue pratique. La raison théorique recherche la connaissance des phénomènes et obéit au principe de raison suffisante. Remonter jusqu'à une cause première elle-même non causée est un désir rationnel légitime que la raison théorique exprime. L'existence d'un premier principe non démontrable mais rationnellement possible et souhaitable est donnée à la raison théorique par la foi, il s'agit de Dieu comme premier moteur de toute création. La raison pratique vise la moralité des actions, et obéit à l'impératif catégorique qui nous enjoint de ne jamais traiter autrui seulement comme un moyen de mon plaisir ou de mon intérêt mais comme une fin en soi à savoir une personne qui a une valeur en elle, une dignité parce qu'elle-même est aussi capable d'exiger d'elle cet impératif (loi morale). Il est moralement nécessaire d'admettre l'existence de Dieu afin de pouvoir penser la réconciliation de la morale et du bonheur. Leur dissociation crée un sentiment d'injustice que la religion apaise par une réparation dans l'au-delà. La religion chrétienne est une religion naturelle en accord avec ce que la raison pratique prescrit. Elle illustre de façon figurée des exigences rationnelles d'un point de vue pratique. La morale conduit à la religion. L'idée de l'existence de Dieu est une exigence de la Raison pratique, un postulat rendu nécessaire subjectivement, sur le plan de l'action. texte de Kant dans la Religion dans les limites de la Raison.
La raison ne peut pas se passer de l’idée de Dieu mais elle reste incapable de déduire l’existence objective de cette perfection. Donc elle ne doit pas tomber dans l’illusion, c’est-à-dire, croire qu’elle peut affirmer l’existence objective de ce qui résulte de son désir de sens. La croyance n’est ainsi irrationnelle que lorsqu’elle se prend pour une connaissance objective et qu’elle s’oublie en tant croyance.
Ainsi si la croyance est toujours relative, contingente, subjective et en ce sens incompatible avec notre raison, elle s’oppose au savoir du fait de son manque de fondement, elle est un obstacle à la recherche commune, la vérité. Mais toutes les croyances ne sont pas irrationnelles, il faut les distinguer en rapport avec les exigences de la raison et revoir en particulier la vérité de foi et la foi comme nouvel ordre de connaissance plus sensible au cœur qu’à la raison. Il n’en demeure pas moins que notre raison est elle-même à l’origine de certaines croyances, la foi peut devenir la conséquence de la raison : la raison prépare ainsi le champ à la foi.
Dieu sensible au cœur
Le coeur a ses raisons que la raison ne connaît point - foi - raison - religion
Citations Pascal les Pensées
Blaise Pascal, né le à Clairmont (aujourd'hui Clermont-Ferrand) en Auvergne et mort le à Paris, est un mathématicien, physicien, inventeur, philosophe, moraliste et théologien français
"C’est le cœur qui sent Dieu, et non la raison: voilà ce que c’est que la foi. Dieu sensible au cœur, non à la raison, écrit Pascal dans ses Pensées,Toute la misère de l'homme vient en effet de ce que Dieu s'est caché à ses yeux, qu'il s'est rendu indigne, par le péché, de retrouver ce qui le rendrait véritablement heureux."
A consulter
Portrait de l'homme abandonné et mise au point sur la vraie nature du divertissement pascalien.
Divertissement pascalien
- Introduction
- I. Le divertissement chez B. Pascal
- 1. La condition de l'homme est source d'effroi
- 2. Le divertissement comme fuite de cet effroi et de soi-même
- 3. Ce que le divertissement révèle sur l'homme
- Lire le document
253. - Deux excès: exclure la raison, n'admettre que la raison.
257. - Il n'y a que trois sortes de personnes: les unes qui servent Dieu, l'ayant trouvé; les autres qui s'emploient à le chercher, ne l'ayant pas trouvé; les autres qui vivent sans le chercher ni l'avoir trouvé. Les premiers sont raisonnables et heureux, les derniers sont fous et malheureux, ceux du milieu sont malheureux et raisonnables.
267. - La dernière démarche de la raison est de reconnaître qu'il y a une infinité de choses qui la surpassent; elle n'est que faible, si elle ne va jusqu'à connaître cela. Que si les choses naturelles la surpassent, que dira-t-on des surnaturelles ?
277. - Le coeur a ses raisons, que la raison ne connaît point; on le sait en mille choses. Je dis que le coeur aime l'être universel naturellement, et soi-même naturellement selon qu'il s'y adonne; et il se durcit contre l'un ou l'autre à son choix. Vous avez rejeté l'un et conservé l'autre: est-ce par raison que vous vous aimez : ?
« Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point. » est un adage philosophique de Blaise Pascal issu de ses Pensées. Stylistiquement, cette citation est une diaphore puisque les raisons et la raison sont à prendre dans deux sens différents.
Contrairement à la croyance populaire, cet adage traite de la religion. Il reflète la pensée de Pascal : la raison n'est pas le meilleur moyen d'appréhender Dieu. L'adage est aujourd'hui utilisé, à tort, pour expliquer les décisions humaines irrationnelles, notamment sur le plan amoureux.
Cette Pensée de Pascal renvoie à l'irrationalité ou au mystère de la foi par rapport à la raison.
278. - C'est le coeur qui sent Dieu et non la raison. Voilà ce que c'est que la foi: Dieu sensible au coeur, non à la raison.
Pour Pascal, il n’y a pas de philosophie chrétienne. Dieu parle directement au cœur à l’intérieur même de l’être, par la grâce, et de l’extérieur par les signes.
«?Dieu sensible au cœur et non à la raison?», la foi est le mouvement de l’homme vers Dieu, un élan d’amour
Dieu est l’examen de conscience, l’homme ne peut pas connaître son propre être, par opposition au cogito cartésien. En fait nous pouvons affirmer que Dieu est au fond de nous même, c’est pourquoi, Dieu est sensible au cœur et non à la raison.
L’ordre du cœur, comme la raison est une manière de penser. C’est une connaissance intuitive, immédiate - le cœur est en fait la faculté de l’insaisissable. Il aspire à l’illimité et à l’absolu, à l’éternel et au parfait. La raison est la faculté de l’humain, le cœur, la faculté du divin.
Ainsi la raison ne peut nous éclairer sur la nature de Dieu. Elle ne peut pas même nous assurer de l’existence de Dieu. La raison manifeste la grandeur de l’homme et elle est éclairée par le cœur. Concernant le mystère et l’existence de Dieu, il y a des cas où nous évitons l’absurde qu’à la condition d’admettre l’inexplicable. Il y a une logique du cœur, une rationalité, il est la partie intuitive de la raison.
La religion comme défense face à l'idée de la mort
Bergson, Les Deux Sources de la Morale et de la Religion, 1932
A consulter
Les animaux ne savent pas qu’ils doivent mourir. Sans doute il en est parmi eux qui distinguent le mort du vivant : entendons par là que la perception du mort et celle du vivant ne déterminent pas chez eux les mêmes mouvements, les mêmes actes, les mêmes attitudes; cela ne veut pas dire qu’ils aient l’idée générale de la mort, non plus d’ailleurs que l’idée générale de la vie, non plus qu’aucune autre idée générale, en tant du moins que représentée à l’esprit et non pas simplement jouée par le corps. Tel animal « fera le mort » pour échapper à un ennemi; mais c'est nous qui désignons ainsi son attitude; quant à lui, il ne bouge pas parce qu’il sent qu’en remuant il attirerait ou ranimerait l’attention, qu’il provoquerait l’agression, que le mouvement appelle le mouvement. On a cru trouver des cas de suicide chez les animaux; a supposer qu’on ne se soit pas trompé, la distance est grande entre faire ce qu’il faut pour mourir et savoir qu’on en mourra; autre chose est accomplir un acte, même bien combiné, même approprié, autre chose imaginer l’état qui s’ensuivra. Mais admettons même que l’animal ait l’idée de la mort. Il ne se représente certainement pas qu’il est destiné à mourir, qu’il mourra de mort naturelle si ce n’est pas de mort violente. Il faudrait pour cela une série d’observations faites sur d’autres animaux, puis une synthèse, enfin un travail de généralisation qui offre déjà un caractère scientifique. A supposer que l’animal pût esquisser un tel effort, ce serait pour quelque chose qui en valût la peine; or, rien ne lui serait plus inutile que de savoir qu’il doit mourir. Il a plutôt intérêt à l’ignorer. Mais l’homme sait qu’il mourra. Tous les autres vivants, cramponnés à la vie, en adoptent simplement l’élan. S’ils ne se pensent pas eux-mêmes sub specie æterni, leur confiance, perpétuel empiétement du présent sur l’avenir, est la traduction de cette pensée en sentiment. Mais avec l’homme apparaît la réflexion, et par conséquent la faculté d’observer sans utilité immédiate, de comparer entre elles des observations provisoirement désintéressées, enfin d’induire et de généraliser. Constatant que tout ce qui vit autour de lui finit par mourir, il est convaincu qu’il mourra lui-même. La nature, en le dotant d’intelligence, devait bon gré mal gré l’amener à cette conviction. Mais cette conviction vient se mettre en travers du mouvement de la nature. Si l’élan de vie détourne tous les autres vivants de la représentation de la mort, la pensée de la mort doit ralentir chez l’homme le mouvement de la vie. Elle pourra plus tard s’encadrer dans une philosophie qui élèvera l’humanité au dessus d’elle-même et lui donnera plus de force pour agir. Mais elle est d’abord déprimante, et elle le serait encore davantage si l’homme n’ignorait, certain qu’il est de mourir, la date où il mourra. L’événement a beau devoir se produire : comme on constate à chaque instant qu’il ne se produit pas, l’expérience négative continuellement répétée se condense en un doute à peine conscient qui atténue les effets de la certitude réfléchie. Il n’en est pas moins vrai que la certitude de mourir, surgissant avec la réflexion dans un monde d’êtres vivants qui était fait pour ne penser qu’à vivre, contrarie l’intention de la nature. Celle-ci va trébucher sur l’obstacle qu’elle se trouve avoir placé sur son propre chemin. Mais elle se redresse aussitôt. A l’idée que la mort est inévitable elle oppose l’image d’une continuation de la vie après la mort; cette image, lancée par elle dans le champ de l’intelligence où vient de s’installer l’idée, remet les choses en ordre ; la neutralisation de l’idée par l’image manifeste alors l’équilibre même de la nature, se retenant de glisser. Nous nous retrouvons donc devant le jeu tout particulier d’images et d’idées qui nous a paru caractériser la religion à ses origines. Envisagée de ce second point de vue, la religion est une réaction défensive de la nature contre la représentation, par l’intelligence, de l’inévitabilité de la mort.
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Date de dernière mise à jour : 30/07/2024
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