L’enseignement de spécialité d’humanités, littérature et philosophie - Les représentations du monde, 1ère, semestre 2

Découverte du monde et pluralité des cultures - Décrire, figurer, imaginer - L’homme et l’animal - HLP 2024, semestre 2 - Classe de 1ère, voie générale

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Les représentations du monde HLP 2024 - 1ère, semestre 2

 

Première, semestre 2

Les représentations du monde

Période de référence : Renaissance, Âge classique, Lumières

Découverte du monde et pluralité des cultures

Décrire, figurer, imaginer

L’homme et l’animal 

La fontaine

Humanités,littérature,philosophie-Épreuves communes contrôle continu 1ère la voie générale. Sujet zéro pour vous entraîner-Représentations du monde

Humanités, littérature et philosophie -Épreuves communes contrôle continu classe de 1ère de la voie générale. Sujet zéro pour vous entraîner-Les représentations du monde, thème 2 sujets 1, 2. Classe de 1ère voie générale 2ème semestre -DESCARTES, Discours de la méthode UN ANIMAL DANS LA LUNE-LA FONTAINE Fables VII

Découverte du monde et pluralité des cultures - Décrire, figurer, imaginer - L’homme et l’animal

Semestre 2 : les représentations du monde

La seconde partie du programme de première est articulée à la période qui s’étend de la Renaissance aux Lumières (XVe siècle - XVIIIe siècle).

Cette période commence avec le développement des idées humanistes et la découverte de « nouveaux mondes » ; elle est aussi marquée par une série de révolutions dans les sciences et les techniques. Ces bouleversements sont inséparables de mutations dans l’économie, dans les sociétés politiques, dans les formes artistiques et littéraires, dans les esprits et dans les mœurs. C’est à la variation et à la transformation des représentations du monde (de la terre habitée comme du cosmos) que cette partie est consacrée. Elle est abordée par trois entrées, qui peuvent se recouper en pratique : Découverte du monde et pluralité des cultures ; Décrire, figurer, imaginer ; L’homme et l’animal. Sans être propres à la période de référence, ces thématiques y trouvent une expression particulièrement riche. 

Découverte du monde et pluralité des cultures

Avec la redécouverte de la culture antique et la crise religieuse, deux sortes de bouleversements ont marqué la culture européenne dans la période de référence : la découverte de nouvelles terres ; le changement des dimensions du monde, lié à la révolution astronomique et à l’invention des instruments d’optique. De même que la cruauté des guerres de religion, la violence des conquêtes lointaines a provoqué une crise de conscience et suscité un nouveau regard critique sur les sociétés européennes. Simultanément, le passage de l’image médiévale d’un monde clos et ordonné à celle d’un espace ouvert, voire infini, a impliqué une remise en question de la place de l’homme dans l’univers, et l’émergence de nouveaux systèmes métaphysiques.

Les échos de ces mutations ont été démultipliés par la nouvelle production et diffusion d’ouvrages imprimés, et portés par toute une variété de textes et d’œuvres : mémoires sur les conquêtes et les colonisations, récits de voyages, fictions d’îles désertes ou de voyages intersidéraux, introduction de l’exotisme dans l’art, mises en scène de la rencontre avec des représentants de cultures lointaines, traités sur les mœurs des peuples et sur l’histoire du genre humain, essais de critique sociale et politique. C’est dans ce répertoire que les professeurs choisissent les textes à étudier, en ménageant à la fois la relation et la distance entre les interrogations de cette période et celles d’aujourd’hui.

? Décrire, figurer, imaginer

Sous un second aspect, on s’intéresse aux formes que la représentation du monde et des choses du monde a prises au cours de la période considérée, dans les sciences et la philosophie comme dans les lettres et les arts. À ce titre, on peut être conduit à évoquer par exemple :

? le développement du livre imprimé, avec ses modes d’illustration, d’organisation et de diffusion ;

? le goût pour les inventaires du monde, à travers les livres d’histoire naturelle, les atlas terrestres ou célestes et la cartographie, l’idéal encyclopédique, les descriptions exotiques et l’intérêt pour l’extraordinaire ;

? l’invention de la perspective artificielle en peinture et les enjeux de la représentation dans les arts visuels ;

? les problématiques de l’imitation en poésie et en littérature, et l’évolution des formes littéraires ;

? le rôle de l’imagination et l’usage de la fiction dans le développement des savoirs sur la nature et sur l’homme. 

L’homme et l’animal

La relation à l’animal constitue un révélateur de la place que l’homme s’attribue dans la nature et dans le monde, avec de fortes implications philosophiques, éthiques et pratiques. La période de référence se caractérise par une remise en question de la frontière entre l’homme et l’animal, telle qu’elle était généralement admise au Moyen Âge. De Montaigne à Buffon, cette séparation apparaît plus fragile ou discutable. Le statut de l’animal devient un enjeu majeur, comme en témoigne l’importance de la querelle sur « l’animal-machine ». Les questions de l’intelligence animale et de la communication entre animaux sont abondamment débattues. Les ressemblances, les analogies et les dissemblances entre hommes et bêtes sont méticuleusement explorées, par le fabuliste comme par le naturaliste. L’étude des textes de la période de référence permet d’explorer la complexité de ces relations et de réfléchir sur ce que la connaissance des autres espèces apporte à la connaissance de l’homme. Elle permet également d’aborder certaines questions vives d’aujourd’hui : l’exploitation animale, les droits des animaux, les « cultures animales »…

Introduction : Qu’est-ce qu’une « représentation du monde » ?

-Faire comprendre aux élèves qu’une représentation du monde est une certaine interprétation en leur faisant comparer des textes de nature différente (mythe, théorie scientifique : Hésiode, Genèse, Galilée, etc.)

- Définir les concepts principaux : monde, représentation, mythe, science, connaissance, croyance, imagination, etc. pour faire comprendre la pluralité des moyens de donner un sens et un ordre à ce que l’on perçoit.

- Faire comprendre aux élèves que cette représentation a pour but d’apprivoiser l’inconnu, l’altérité (tout ce qui est différent de soi et de ce qu’on connaît), mais que ce faisant elle explique autant qu’elle masque, méconnaît des aspects de la réalité. (Exemples à trouver)

 

Problématique générale : Les hommes ont toujours cherché à donner un ordre et un sens au monde pour le rendre familier. Or toute découverte qui les confronte à l’inconnu ou à l’altérité remet en cause cette familiarité. Dès lors comment les hommes ont-ils accueilli et pensé les découvertes qui les ont contraints à transformer leur représentation du monde pendant l’époque moderne (de la Renaissance aux Lumières) ?

1ère partie : Les changements de la représentation du monde à partir de la Renaissance

La représentation du monde de l’Antiquité jusqu’au Moyen Age entre connu et inconnu.

- La cosmologie grecque formalisée par Ptolémée et sa reprise par le christianisme et l’étendue du monde connu. Carte + texte explicatif (Aristote, Ptolémée).

 

La Révolution Copernicienne et Galiléenne :

- La remise en cause de l’héliocentrisme par Copernic et surtout par Galilée.

- Le changement de méthode dans la cosmologie : l’utilisation de la lunette astronomique. Non plus seulement observer et raisonner, mais expérimenter, interroger la nature.

- Travail sur des textes de Galilée, extrait d’un documentaire (Galilée, la naissance d’une étoile),

Du monde clos à l’univers infini :

- Comment est-on passé d’un monde fini et centré sur l’homme à un monde infini et indifférent à l’homme ? Texte de Koyré.

- Pouvons-nous nous représenter ce monde infini ? Différence entre connaître et penser (Kant), entre savoir (expérimenter) et spéculer (Cf. Aurélien Barrau).

Ouverture : l’univers est infini,

Ce décentrement n’a cessé de se poursuivre jusqu’à aujourd’hui (la notion de « multivers », extrait d’une émission de France culture avec Aurélien Barrau…)

Évaluation partie 1 : commentaire philosophique

 

2ème partie : l’homme à l’épreuve de l’altérité : autres espèces, autres cultures

Intro : qu’est-ce que l’homme ?

- Qu’est-ce qu’une définition (Aristote) et pourquoi est-ce difficile de définir l’homme ? Pic de la Mirandole (être indéterminé), Kant : l’humanité s’acquiert par l’éducation.

- L’homme s’est donc toujours défini par rapport aux autres (dieux, animaux). Intermédiaire entre Dieu et les animaux : La Genèse, Machiavel...

Prolongements : les questions posées par les préhistoriens sur le propre de l’homme et le « début » du genre « homo »

Rappel de la problématique générale.

L’homme est-il un animal comme les autres ?

- L’homme se distingue par ce qui le différencie des autres animaux, mais cela est-il légitime ?

Controverse entre Descartes et Montaigne : Descartes

- Les animaux ont-ils une âme, pensent-ils ?

- La question du langage des animaux.

- L’homme dans la classification : de Linné au XVIIIè à Darwin.

- L’inversion des rôles dans la fiction : La planète des singes (film)…

- Ouverture sur les découvertes de l’éthologie et la question du droit des animaux.

Exercice oral : une controverse « faut-il accorder des droits aux animaux » ?

 

La découverte des autres cultures

Les grands voyages d’exploration et l’expansion du monde à partir du XVème siècle :

- Exemple de la découverte de l’Amérique. Le changement de la représentation du monde physique. Travailler sur des cartes et des textes d’explorateurs.

- La confrontation à des cultures très différentes :

L’exemple de « la controverse de Valladolid », la tentation de rejeter l’autre pour ne pas se remettre en cause. Parallèle avec le rejet des animaux. (Texte de Las Casas)

- Ouverture : les zoos humains et le racisme.

L’homme vu de l’extérieur : du regard étranger à l’ethnologie

- Qu’est-ce qu’une culture ? Et qu’est-ce que nous apprend la diversité des cultures ?

- Ouverture : la naissance de l’ethnologie. De l’ethnocentrisme spontané à l’acceptation de la diversité humaine : Lévi-StraussRace et histoire.

 

- Conclusion générale : vers un nouvel humanisme encore à construire, qui ne se fonde pas sur l’exclusion de figures de l’altérité (animaux, autres « civilisations » ou « races »), mais où l’homme prend aujourd’hui conscience avec les problèmes écologiques des limites et de la finitude de la terre

Strauss

Qu'est-ce qui fait de l'homme un être de culture? Ethnocentrisme et relativité des cultures- Cours, réflexions sur la séquence culture, bac 

Qu'est-ce qui fait de l'homme un être de culture? Ethnocentrisme, relativité des cultures- bac de philosophie -Définition, réflexions autour de Darwin, Lévi-Strauss, Arendt, La controverse de Valladolid, Indiens du Nouveau-Monde sont-ils des hommes? l'homme un être de culture? la culture fait-elle l'homme?

Le vivant

Le vivant - l'esprit, la matière -La conception spiritualiste, finaliste, matérialiste, mécaniste du vivant - Aristote - Descartes- Philo 

Le vivant - l'esprit, la matière -La conception spiritualiste du vivant - Aristote- La conception matérialiste et mécaniste Descartes- Analyse du morceau de cire -Dossier le réel et le virtuel - La question de la nature du réel - Enjeux problèmes :L'esprit n'est-il pas lui-même matériel ?Fiche synthèse du cours

Exemple de textes: les représentations du monde

 

Les représentations du monde

Propositions de textes philosophiques 

1ère partie : les changements de la représentation du monde à partir de la Renaissance

La Théogonie d’Hésiode, VIIIème av JC. :

Au début régnait Chaos et l’espace était fait de vide. Puis, il y eut Gaïa, l’ancêtre de la terre. Ensuite vint Tartaros, l’abîme, et Éros, la force de l’amour : Éros l’éternel. De Chaos vint Erèbe et la noire Nuit. Et de Nuit, à son tour sortirent Éther et Lumière. Gaïa enfanta le ciel (Ouranos) et développa la terre. Ainsi fut créé le monde. Le ciel et la terre avaient une charpente solide, la mer se jetait sur la rive de la terre. Toutes sortes de créatures peuplaient la terre ; les poissons s’ébattaient dans les vagues, les oiseaux dans le ciel et des animaux de toutes les espèces se pressaient sur le sol d’un pas agile. Mais manquait encore à cette création celui qui dominerait de son esprit ce large monde. Alors, Prométhée arriva sur terre. Il prit de l’argile et façonna un modèle à l’image des dieux. Il enferma dans sa poitrine les attributs du bien comme du mal, ceux que l’on trouve dans l’âme de chaque créature vivant sur cette terre. Ainsi forma-t-il l’âme humaine. La déesse Athéna, son amie céleste, admirant l’ouvre de Prométhée, insuffla la vie aux humains et leur donna l’esprit.

- La genèse (version abrégée), traduction Louis Segond (1910) :

Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre. La terre était informe et vide : il y avait des ténèbres à la surface de l’abîme, et l’esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux. Dieu dit : Que la lumière soit ! Et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne ; et Dieu sépara la lumière d’avec les ténèbres. Dieu appela la lumière jour, et il appela les ténèbres nuit. Ainsi il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le premier jour.

Dieu dit : Qu’il y ait une étendue entre les eaux, et qu’elle sépare les eaux d’avec les eaux. Et Dieu fit l’étendue, et il sépara les eaux qui sont au-dessous de l’étendue d’avec les eaux qui sont au-dessus de l’étendue. Et cela fut ainsi. Dieu appela l’étendue ciel. Ainsi il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le second jour.

Dieu dit : Que les eaux qui sont au-dessous du ciel se rassemblent en un seul lieu, et que le sec paraisse. Et cela fut ainsi. Dieu appela le sec terre, et il appela l’amas des eaux mers. Dieu vit que cela était bon. Puis Dieu dit : Que la terre produise de la verdure, de l’herbe portant de la semence, des arbres fruitiers donnant du fruit selon leur espèce et ayant en eux leur semence sur la terre. Et cela fut ainsi. La terre produisit de la verdure, de l’herbe portant de la semence selon leur espèce, et des arbres donnant du fruit et ayant en eux leur semence selon leur espèce. Dieu vit que cela était bon. Ainsi il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le troisième jour.

Dieu dit qu’il y ait des luminaires dans l’étendue du ciel, pour séparer le jour d’avec la nuit ; que ce soient des signes pour marquer les époques, les jours et les années ; et qu’ils servent de luminaires dans l’étendue du ciel, pour éclairer la terre. Et cela fut ainsi. Dieu fit les deux grands luminaires, le plus grand luminaire pour présider au jour, et le plus petit luminaire pour présider à la nuit ; il fit aussi les étoiles. Dieu les plaça dans l’étendue du ciel, pour éclairer la terre, pour présider au jour et à la nuit, et pour séparer la lumière d’avec les ténèbres. Dieu vit que cela était bon. Ainsi, il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le quatrième jour.

Dieu dit : Que les eaux produisent en abondance des animaux vivants, et que des oiseaux volent sur la terre vers l’étendue du ciel. Dieu créa les grands poissons et tous les animaux vivants qui se meuvent, et que les eaux produisirent en abondance selon leur espèce ; il créa aussi tout oiseau ailé selon son espèce. Dieu vit que cela était bon. Dieu les bénit, en disant : Soyez féconds, multipliez, et remplissez les eaux des mers ; et que les oiseaux multiplient sur la terre. Ainsi il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le cinquième jour.

Dieu dit : Que la terre produise des animaux vivants selon leur espèce, le bétail selon son espèce, et tous les reptiles de la terre selon leur espèce. Dieu vit que cela était bon. Puis Dieu dit : Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu’il domine sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur le bétail, sur toute la terre, et sur tous les reptiles qui rampent sur la terre. Dieu créa l’homme à son image, il le créa à l’image de Dieu, il créa l’homme et la femme. Dieu les bénit, et Dieu leur dit : Soyez féconds, multipliez, remplissez la terre, et l’assujettissez ; et dominez sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, et sur tout animal qui se meut sur la terre. Et Dieu dit : Voici, je vous donne toute herbe portant de la semence et qui est à la surface de toute la terre, et tout arbre ayant en lui du fruit d’arbre et portant de la semence : ce sera votre nourriture. Et à tout animal de la terre, à tout oiseau du ciel, à tout ce qui se meut sur la terre, ayant en soi un souffle de vie, je donne toute herbe verte pour nourriture. Et cela fut ainsi. Dieu vit tout ce qu’il avait fait et voici, cela était très bon. Ainsi, il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le sixième jour.

Ainsi furent achevés les cieux et la terre, et toute leur armée. Dieu acheva au septième jour son œuvre, qu’il avait faite : et il se reposa au septième jour de toute son œuvre, qu’il avait faite. Dieu bénit le septième jour, et il le sanctifia, parce qu’en ce jour il se reposa de toute son œuvre qu’il avait créée en la faisant. Voici les origines des cieux et de la terre, quand ils furent créés.

Lorsque l’Éternel Dieu fit une terre et des cieux, aucun arbuste des champs n’était encore sur la terre, et aucune herbe des champs ne germait encore : car l’Éternel Dieu n’avait pas fait pleuvoir sur la terre, et il n’y avait point d’homme pour cultiver le sol. Mais une vapeur s’éleva de la terre, et arrosa toute la surface du sol. L’Éternel Dieu forma l’homme de la poussière de la terre, il souffla dans ses narines un souffle de vie et l’homme devint un être vivant. Puis l’Éternel Dieu planta un jardin en Éden, du côté de l’orient, et il y mit l’homme qu’il avait formé. L’Éternel Dieu fit pousser du sol des arbres de toute espèce, agréables à voir et bons à manger, et l’arbre de la vie au milieu du jardin, et l’arbre de la connaissance du bien et du mal...

Par contraste avec les mythes, un texte scientifique contemporain qui résume la vision actuelle de l’origine de l’univers : Aurélien Barrau, Big bang et au-delà, les nouveaux horizons de l’Univers, 2013, p. 9-11.

L’Univers a 13,81 milliards d’années.

Au commencement il n’y avait ni temps, ni espace, ni aucune particules aujourd’hui identifiées. N’existait qu’une sorte de mousse constituée de cordes ou de boucles. Cette mousse enfle et se complexifie. l’espace, le temps, la gravitation émergent. Une force unifiée régit alors l’Univers dont la taille commence à croître démesurément. Cette brève, mais immensément intense, phase d’inflation cesse brutalement. S’y dessinent les fluctuations microscopiques à l’origine des galaxies et des étoiles… Apparaissent les forces et corpuscules connus. La température chute. l’Univers poursuit son expansion mais le rythme s’est calmé. Matière et antimatière se sont en grande partie annihilées, seul un infime reliquat demeure, auquel nous devons pourtant tout ce qui nous compose aujourd’hui. Les premiers noyaux se forment. l’Univers est encore si chaud qu’il est opaque à sa propre lumière, immédiatement absorbée dès qu’elle commence à se propager. Le monde n’est qu’un étrange bain sombre de constituants élémentaires en interaction. Enfin, la température devient assez faible pour que les électrons puissent se joindre aux noyaux et former des atomes ! Le cosmos devient transparent.

La gravitation reprend peu à peu ses droits. Des nuages de gaz s’effondrent. Apparaissent les étoiles qui se structurent en galaxies. Les plus massives de ces étoiles vivent très peu de temps, explosent et forment des trous noirs, des « astres occlus ». Les éléments lourds, essentiels pour l’apparition de la vie, commencent à être synthétisés. Autour des étoiles, se forment des planètes au sein desquelles peut prendre naissance une chimie subtile. La température moyenne de l’Univers n’est plus que de quelques degrés au-dessus du zéro absolu (-273°C). Étonnamment, l’expansion de l’Univers accélère à nouveau ! La distance entre les corps célestes augmente exponentiellement et une évolution imprévue semble se dessiner. Voilà où nous en sommes.

Cette histoire est notre histoire. Elle est ce qu’on croit être le moins mauvais récit de nos origines. Elle est le cadre dans lequel se déploie ou se déplie notre physique. Elle constitue un mélange, parfois savant, souvent baroque, de quasi-certitudes et de spéculations effrénées. Elle ne s’achève pas ici. Elle se prolonge dans de multiples directions. Les interrogations et incompréhensions sont plus nombreuses que les réponses et les évidences.

- La cosmologie d’Aristote : géocentrisme et distinction entre le monde sublunaire et le monde supralunaire, Pierre Pellegrin, Dictionnaire Aristote, Ellipses, 2007, p. 184-186 :

L’univers d’Aristote est unique, fini, éternel, sphérique et globalement parfait. Cette éternité de l’univers est une partie importante de la réponse d’Aristote à Parménide. Le problème de la venue à l’être du Tout […] se trouve ainsi disqualifié. Aristote rompt donc avec la cosmogonie, pour devenir le premier cosmologiste, le premier et le seul avant longtemps, puisque ses successeurs affronteront de nouveau le problème de l’origine du cosmos. Étant éternel, l’univers doit être, dans une certaine mesure parfait, autrement il serait corruptible. Il est constitué de sphères concentriques sur lesquelles sont fixés des corps célestes. Elles ont comme centre commun le centre de la Terre, laquelle est immobile au centre de l’univers. La dernière de ces sphères est le « premier ciel » sur lequel sont fixées les étoiles fixes. Il est mû directement par le dieu d’Aristote, le premier moteur immobile. Les planètes, quant à elles, sont animées d’une part du mouvement général du premier ciel et, d’autre part des mouvements des sphères sur lesquelles elles sont fixées. On parle donc de « sphères » par habitude et par commodité, mais il faudrait parler d’anneaux sphériques, dans lesquels sont enchâssées les planètes. Pour rendre compte des mouvements apparemment irréguliers des planètes, Aristote semble avoir repris l’hypothèse d’Eudoxe de Cnide selon laquelle chaque astre se trouve sur plusieurs sphères concentriques mais dont les axes de rotation ne sont pas les mêmes. Il fallait ainsi trois sphères pour rendre compte du mouvement de la Lune et trois autres pour celui du Soleil, mais quatre pour le mouvement des autres planètes. Callipe de Cysique, successeur d’Eudoxe, introduisit de nouvelles sphères, ce qui amena leur nombre à trente-quatre, y compris la sphère des fixes. Une tradition affirme que Callipe a travaillé avec Aristote. Mais, alors qu’Eudoxe et Callipe proposaient une hypothèse ou, si l’on veut, une sorte de fiction théorique pour, comme Simplicius le leur fait dire, « sauver les phénomènes », c’est-à-dire les apparences et notamment les apparences des mouvements irréguliers des planètes, Aristote considère que son modèle théorique décrit une situation réellement existante. […]

L’univers d’Aristote est affecté d’une césure profonde entre que ce la tradition a appelé les régions supralunaire et sublunaire – Aristote parle des « choses de la-bas » et des « choses d’ici ». La première, qui s’étend entre la sphère des fixes et l’orbite de la Lune, est le lieu des seuls mouvements des corps célestes, tous réductibles, par le biais de la théorie des sphères concentriques, à des mouvements circulaires réguliers. Elle est entièrement pleine, puisqu’il n’y a pas de vide dans l’univers aristotélicien, et elle est plus précisément constituée d’anneaux sphériques concentriques tangents. Aristote soutient, dans le traité Du ciel, que cette région est entièrement composée d’un élément propre, différent des quatre éléments du monde sublunaire, que la tradition a nommé la « quintessence », dont la propriété essentielle est de ce mouvoir en cercle. La région sublunaire, en revanche, qui est celle dans laquelle nous vivons, est composée des quatre éléments qu’Aristote a empruntés à Empédocle : la terre, l’eau, l’air, le feu. Cette région sublunaire est affectée de mouvements divers et souvent désordonnés, et même si des régularités assez nombreuses s’y repèrent – ce qui rend possible d’appliquer la science, et notamment la physique à cette région sublunaire –, elles sont affectées d’un certain coefficient d’incertitude.

« Dans sa Syntaxe mathématique, plus connue sous le titre d'Almageste, et dans laquelle la dernière observation consignée date de 141, Claude Ptolémée (IIe siècle) expose l'ensemble des connaissances astronomiques de son époque. Il décrit en particulier le mouvement du Soleil, de la Lune et des planètes autour de la Terre, considérée comme le centre du monde, au moyen d'un ensemble complexe de trajectoires circulaires décrites d'un mouvement uniforme : les déférents, autour de la Terre, et les épicycles, dont les centres parcourent les déférents. Ptolémée parvient ainsi à prédire le mouvement des astres avec une bonne précision, compatible avec celle des observations menées durant l'Antiquité. À une époque où l'on ne connaissait rien des causes physiques du mouvement des planètes, cette description purement géométrique et cinématique pouvait être considérée comme entièrement satisfaisante. Le système de Copernic n'est à cet égard pas supérieur à celui de Ptolémée. Kepler constatera cependant que les mouvements circulaires uniformes ne donnaient pas une bonne éphéméride de Mars, ce qui le conduira à découvrir les lois qui portent son nom. » James Lequeux, Universalis.fr

- Galilée, extrait de Sidereus Nuncius (cité par Alexandre Koyré, Du monde clos à l’univers infini, Gallimard,1957, p. 118)

Chacun peut se rendre compte avec la certitude des sens, que la lune est dotée d’une surface non point lisse et polie, mais faite d’aspérités et de rugosités, et que, tout comme la face de la terre elle-même, elle est toute en gros renflements, gouffres profonds et courbures. Ce n’est pas, à mon avis, un mince résultat que d’avoir mis fin à des controverses concernant la Galaxie ou Voie lactée et d’en avoir rendu l’essence manifeste, non seulement aux sens, mais à l’intellect ; et c’est chose plaisante et magnifique, que d’avoir en outre montré du doigt la substance de certaines étoiles, qualifiées jusqu’à présent de nébuleuses par tous les astronomes, substance toute différente de ce qu’on croyait. Mais ce dont la portée est bien au-delà de toute surprise et admiration et m’a par-dessus tout déterminé à réclamer l’attention de tous les astronomes et philosophes, c’est certes notre découverte de quatre planètes demeurées inconnues et invisibles à tous nos prédécesseurs, planètes qui accomplissent leur révolution autour d’une grosse étoile déjà connue, tout comme Vénus et Mercure autour du soleil et qui sont tantôt en avance et tantôt en retard sur elle, sans que leur digression dépasse jamais certaines limites. Tout cela a été découvert et observé récemment au moyen des perspicilli (du télescope), que j’avais inventé de par une illumination préalable de mon esprit par la Grâce divine.

- Galilée, extrait du Dialogue sur les deux grands systèmes du monde, Points, p. 89-90 :

« Au lecteur avisé. Les années passées, on a publié à Rome un édit salutaire qui, pour faire face aux dangereux scandales de l’époque actuelle, imposait opportunément silence à l’opinion pythagoricienne de la mobilité de la terre. Il n’a pas manqué de personnes pour affirmer témérairement que ce décret procédait non d’un examen judicieux, mais d’une passion trop peu informée, et on a entendu se plaindre et dire que des Consulteurs inexpérimentés en observations astronomiques ne devaient pas par de brusques interdictions couper les ailes aux intellects spéculatifs. Mon zèle n’a pu se taire en entendant ces téméraires lamentations. Pleinement instruit de cette décision très prudente, j’ai jugé bon de paraître publiquement sur le Théâtre du Monde comme simple témoin de la vérité. […]

C’est à cette fin que j’ai pris dans la discussion le parti de Copernic, cheminant comme en pure Hypothèse Mathématique, cherchant par les voies les plus artificieuses à la présenter comme supérieure à l’hypothèse de l’immobilité de la terre, quand on prend cette dernière non pas absolument, mais telle qu’elle est défendue par certains : péripatéticiens de profession, ils n’en retiennent que le nom, puisque, sans se promener jamais, ils se contentent d’adorer les ombres, philosophant sans être informés comme il le faut, se souvenant seulement de quatre principes mal compris.

Je traiterai de trois thèmes principaux. Je chercherai d’abord à montrer que toutes les expériences qu’on peut faire sur la terre sont insuffisantes pour conclure à sa mobilité, mais aussi qu’elles peuvent indifféremment s’accorder aussi bien avec la mobilité de la terre qu’avec son repos ; et j’espère à cette occasion révéler bien des observations qui furent ignorées de l’Antiquité. En second lieu, j’examinerai les phénomènes célestes, en donnant de la force aux hypothèses coperniciennes comme si elles devaient absolument obtenir la victoire, et j’ajouterai de nouvelles réflexions qui rendent l’astronomie plus facile sans pour autant répondre à une nécessité de la nature. En troisième lieu, je proposerai une ingénieuse fantaisie. Il se trouve que j’ai dit, il y a bien des années, que le problème non résolu du flux de la mer pouvait recevoir quelque lumière si on admettait le mouvement de la Terre. […]

J’espère que ces remarques permettront au monde de savoir que, si d’autres nations ont navigué plus que nous, nous n’avons pas réfléchi moins qu’elles et que, si nous continuons à affirmer la stabilité de la Terre et nous contentons de voir dans le contraire une curiosité mathématique, cela ne vient pas de notre ignorance de la pensée des autres, cela vient, entre autres, de raisons qui nous recommandent la piété, la religion, la connaissance de la toute-puissance divine et la conscience de la faiblesse de l’esprit humain.

Alexandre Koyré, Du monde clos à l’univers infini, Gallimard, 1957.

J’ai essayé […] de définir les schémas structurels de l’ancienne et de la nouvelle conception du monde et de décrire les changements produits par la révolution du XVIIe siècle. Ceux-ci me semblent pouvoir être ramenés à deux éléments principaux, d’ailleurs étroitement liés entre eux, à savoir la destruction du Cosmos, et la géométrisation de l’espace, c’est-à-dire a) la destruction du monde conçu comme un tout fini et bien ordonné, dans lequel la structure spatiale incarnait une hiérarchie de valeur et de perfection, monde dans lequel « au-dessus » de la Terre lourde et opaque, centre de la région sublunaire du changement et de la corruption, s’« élevaient » les sphères célestes des astres impondérables, incorruptibles et lumineux, et la substitution à celui-ci de l’Univers indéfini, et même infini, ne comportant plus aucune hiérarchie naturelle et uni seulement par l’identité des lois qui le régissent dans toutes ses parties, ainsi que par celle de ses composants ultimes placés, tous, au même niveau ontologique ; et b) le remplacement de la conception aristotélicienne de l’espace, ensemble différencié de lieux intramondains, par celle de l’espace de la géométrie euclidienne – extension homogène et nécessairement infinie – désormais considéré comme identique, en sa structure, avec l’espace réel de l’Univers. Ce qui, à son tour, impliqua le rejet par la pensée scientifique de toutes considérations basées sur les notions de valeur, de perfection, d’harmonie, de sens ou de fin, et finalement, la dévalorisation complète de l’Être, le divorce total entre le monde des valeurs et le monde des faits.

2ème partie : l’homme à l’épreuve de l’altérité - L’homme et l’animal : l’homme est-il un animal comme les autres ?

 

Introduction : comment définir l’homme ?

- Pic de la Mirandole : l’homme est un être indéterminé qui peut déterminer lui-même sa nature

Déjà Dieu, Père suprême et suprême Architecte, avait construit, avec des lois d’une mystérieuse sagesse, cette maison du monde que nous voyons, auguste temple de sa divinité : il avait orné la région supra-céleste d’intelligences, il avait animé les astres éthérés d’esprits immortels, il avait peuplé d’une foule de toutes sortes d’animaux les parties pourrissantes et bourbeuses du monde inférieur. Mais après cette œuvre, l’Artisan désirait qu’il y eût quelqu’un qui appréciât la raison d’une telle œuvre, en aimât la beauté, en admirât la grandeur. C’est pourquoi quand tout cela fût terminé, comme Moïse et Timée en témoignent, en dernier lieu, il pensa à créer l’homme. Mais il n’y avait pas dans les archétypes de quoi façonner une nouvelle race, ni dans les trésors de quoi doter ce nouveau fils d’un héritage, ni parmi les sièges d’honneur du monde entier un siège où ce contemplateur de l’univers pût s’asseoir. Tout était déjà rempli : tout avait été distribué aux ordres supérieurs, moyens et inférieurs. Mais il n’eût pas été digne de la puissance du Père, au dernier acte de la génération, comme par épuisement, de se trouver dépourvu […]

Enfin le parfait Artisan décida qu’à celui à qui rien ne pouvait être donné en propre serait commun tout ce qui avait été donné en particulier à chacune des créatures. Il prit donc l’homme, cette œuvre d’un type indéfini, et l’ayant placé au milieu du monde, il lui parla ainsi : « Ô Adam, nous ne t’avons donné ni une place déterminée, ni une physionomie propre, ni aucun don particulier, afin que la place, la physionomie, les dons que toi-même tu aurais souhaités, tu les aies et tu les possèdes selon tes vœux, selon ta volonté. Pour les autres, leur nature définie est régie par des lois que nous avons prescrites ; toi, tu n’es limité par aucune barrière, c’est de ta propre volonté, dans le pouvoir de laquelle je t’ai placé, que tu détermineras ta nature. Je t’ai installé au milieu du monde afin que de là tu examines plus commodément autour de toi tout ce qui existe dans le monde. Nous ne t’avons ni céleste ni terrestre, ni mortel ni immortel, afin que, maître de toi-même, et ayant pour ainsi dire l’honneur et la charge de façonner et de modeler ton être, tu te composes la forme que tu aurais préférée. Tu pourras dégénérer en formes inférieures qui sont animales, tu pourras, par décision de son esprit, être régénéré en formes supérieures qui sont divines. » Ô libéralité suprême du Dieu Père, suprême et merveilleuse félicité de l’homme ! A lui est donné d’avoir ce qu’il désire, d’être ce qu’il veut. Les animaux, en naissant, apportent avec eux (comme dit Lucilius) « du sein de leur mère », ce qu’ils posséderont. Les esprits les plus haut placés furent, dès le début et aussitôt après, ce qu’ils seront éternellement. A l’homme naissant Dieu a donné les semences les plus variées et les germes de toutes espèces de vie. […]

Mais à quoi bon tout cela ? Afin que nous comprenions, puisque nous sommes nés capables de devenir ce que nous voulons, que nous devons veiller à ce que l’on ne dise pas de nous qu’alors que nous étions d’un rang élevé, nous l’avons ignoré et sommes devenus semblables à des bêtes et à des animaux inconscients ; mais que plutôt se vérifie cette parole du prophète Asaph : « Vous êtes des Dieux et tous vous êtes fils du Très-Haut ». Afin que, n’abusant pas de la miséricordieuse libéralité du Père, nous ne fassions pas du libre-arbitre, qu’il nous a donné pour nous sauver, la cause de notre damnation.

Pic de la Mirandole, De la dignité de l’homme, 1486 (cité dans le recueil de Luc Ferry et Claudine Germé, Des animaux et des hommes, Le livre de poche, 1994)

- Kant, l’homme ne devient homme que par l’éducation

L’homme est la seule créature qui doive être éduquée. Par éducation en entend, en effet, les soins (l’alimentation, l’entretien), la discipline, et l’instruction avec la formation. Dès qu’ils les possèdent quelque peu, les animaux usent de leurs forces régulièrement, c’est-à-dire de telle sorte qu’elles ne leur soient pas nuisibles. La plupart des animaux ont besoin d’être nourris certes ; ils n’ont pas besoin de soins. On entend par soins les précautions que prennent les parents pour éviter que les enfants ne fassent un usage nuisible de leurs forces. [...] La discipline transforme l’animalité en humanité. Par son instinct un animal est déjà tout ce qu’il peut être ; une raison étrangère a déjà pris soin de tout pour lui. Mais l’homme doit user de sa propre raison. Il n’a point d’instinct et doit se fixer lui-même le plan de sa conduite. Or puisqu’il n’est pas immédiatement capable de le faire, mais au contraire vient au monde pour ainsi dire à l’état brut, il faut que d’autres le fassent pour lui. La discipline empêche que l’homme soit détourné de sa destination, celle de l’humanité, par ses penchants animaux. Elle doit par exemple lui imposer des bornes de telle sorte qu’il ne se précipite pas dans les dangers sauvagement et sans réflexion. La discipline est ainsi simplement négative ; c’est l’acte par lequel on dépouille l’homme de son animalité ; en revanche l’instruction est la partie positive de l’éducation. [...] L’homme ne peut devenir homme que par l’éducation. Il n’est que ce que l’éducation fait de lui. [...] L’homme peut ou bien être simplement dressé, dirigé, mécaniquement instruit, ou bien être réellement éclairé. On dresse des chiens, des chevaux ; on peut aussi dresser des hommes. L’éducation n’est pas encore à son terme avec le dressage ; en effet il importe avant tout que les enfants apprennent à penser.

Emmanuel Kant, Réflexions sur l’éducation (1776-1787).

L’homme et l’animal : l’homme est-il un animal comme les autres ?

Étude comparée de deux longs passages de Montaigne et de Descartes :

- Montaigne, Apologie de Raymond Sebond, Essais, Livre 2, 1588 : entre l’homme et les autres animaux pas de différence de nature mais seulement de degré

Considérons donc pour cette heure l’homme seul, sans secours étranger, armé seulement de ses armes, et dépourvu de la grâce et connaissance divine, qui est tout son honneur, sa force et le fondement de son être. Voyons combien il a de tenue en ce bel équipage. Qu’il me fasse entendre par l’effort de son discours, sur quels fondements il a bâti ces grands avantages qu’il pense avoir sur les autres créatures. Qui lui a persuadé que ce branle admirable de la voûte céleste, la lumière éternelle de ces flambeaux roulant si fièrement sur sa tête, les mouvements épouvantables de cette mer infinie, soient établis et se continuent tant de siècles pour sa commodité et pour son service ? Est-il possible de rien imaginer de si ridicule que cette misérable créature, qui n’est pas seulement maîtresse de soi, exposée aux offenses de toutes choses, se dise maîtresse et emperière de l’univers, duquel il n’est pas en sa puissance de connaître la moindre partie, tant s’en faut de la commander ? Et ce privilège qu’il s’attribue d’être seul en ce grand bâtiment, qui ait la suffisance d’en reconnaître la beauté et les pièces, seul qui en puisse rendre grâces à l’architecte et tenir compte de la recette et mise au monde, qui lui a scellé ce privilège ? […]

Pourquoi les privons-nous et d’âme, et de vie, et de discours [de raison] ? Y avons-nous reconnu quelque stupidité immobile et insensible, nous qui n’avons aucun commerce avec eux, que l’obéissance ? Dirons-nous que nous n’avons vu en nulle autre créature qu’en l’homme l’usage d’une âme raisonnable ? […] La présomption est notre maladie naturelle et originelle. La plus calamiteuse et frêle de toutes les créatures, c’est l’homme, et quant et quant la plus orgueilleuse. […] C’est par la vanité de son imagination qu’il s’égale à Dieu, qu’il s’attribue les conditions divines, qu’il se trie soi-même et sépare de la presse des autres créatures, taille la part aux animaux ses confrères et compagnons, et leur distribue telle portion de facultés et de forces que bon lui semble. Comment connaît-il, par l’effort de son intelligence, les branles internes et secrets des animaux ? Par quelle comparaison d’eux à nous conclut-il la bêtise qu’il leur attribue ?

Quand je joue avec ma chatte, qui sait si elle passe son temps de moi plus que je ne fais d’elle ? […] Ce défaut qui empêche la communication d’entre elle et nous, pourquoi n’est-il aussi bien à nous qu’à elles ? C’est à deviner à qui est la faute de ne nous entendre point ; car nous ne les entendons non plus que nous. Par cette même raison, elles nous peuvent estimer bêtes, comme nous les en estimons. […] Il nous faut remarquer la parité qui est entre nous. Nous n’avons quelque moyenne intelligence de leur sens : aussi les bêtes du nôtre, environ à même mesure. Elles nous flattent, nous menacent et nous requièrent, et nous elles. Au demeurant, nous découvrons bien évidemment qu’entre elles il y a une pleine et entière communication et qu’elles s’entr’entendent, non seulement celles de même espèce, mais aussi d’espèces diverses. […] En certain aboyer du chien le cheval connaît qu’il y a de la colère ; de certaine autre sienne vois il ne s’effraie point. Aux bêtes mêmes qui n’ont pas de voix, par la société d’offices que nous voyons entre elles, nous argumentons aisément quelque autre moyen de communication : leurs mouvements discourent et traitent : « A peu près comme on voit les enfants recourir au geste par leur impuissance à s’exprimer avec les mots », Lucrèce, De la nature. Pourquoi non, tout aussi bien que nos muets disputent, argumentent et content des histoires par signes ? […]

Au reste, quelle sorte de notre suffisance [nos facultés] ne reconnaissons-nous aux opérations des animaux ? […] Les hirondelles que nous voyons au retour du printemps fureter tous les coins de nos maisons, cherchent-elles sans jugement et choisissent-elles sans discrétion, de milles places, celle qui leur est la plus commode à se loger ? […] pourquoi épaissit l’araignée sa toile en un endroit et relâche en un autre ? Se sert à cette heure de cette sorte de nœud, tantôt de celle-là, si elle n’a et délibération, en pensée, et conclusion ? Nous reconnaissons assez, en la plupart de leurs ouvrages, combien les animaux ont d’excellence au-dessus de nous et combien notre art est faible à les imiter. Nous voyons toutefois aux nôtres, plus grossiers, les facultés que nous y employons, et que notre âme s’y sert de toutes ses forces ; pourquoi n’en estimons-nous autant d’eux ? Pourquoi attribuons-nous à je ne sais quelle inclination naturelle et servile les ouvrages qui surpassent tout ce que nous pouvons par nature et par art ? […]

Quant au parler, il est certain que, s’il n’est pas naturel, il n’est pas nécessaire. Toutefois je crois qu’un enfant qu’on aurait nourri en pleine solitude, éloigné de tout commerce (qui serait un essai malaisé à faire), aurait quelque espèce de parole pour exprimer ses conceptions ; et ce n’est pas croyable que nature nous ait refusé ce moyen qu’elle a donné a plusieurs autres animaux : car, qu’est-ce autre chose que parler, cette faculté que nous leur voyons de se plaindre, de se réjouir, de s’entr’appeler au secours, se convier à l’amour, comme ils font par l’usage de leur voix ? Comment ne parleraient-elles entr’elles ? Elles parlent bien à nous, et nous à elles. En combien de sortes parlons-nous à nos chiens ? Et ils nous répondent. D’autre langage, d’autres appellations divisons-nous avec eux qu’avec les oiseaux, avec les pourceaux, les bœufs, les chevaux, et changeons d’idiome selon l’espèce. […]

Nous ne sommes ni au-dessus, ni au-dessous du reste : tout ce qui est sous le Ciel, sit le sage, court une loi et fortune sans pareille, « Tout est enchaîné dans les liens de la fatalité » (Lucrèce, De la nature). Il y a quelque différence, il y a des ordres et des degrés ; mais c’est sous le visage d’une même nature : « Chaque chose a son développement propre, et toutes conservent les différences que la nature leur a décrétées » (Lucrèce, De la nature). Il faut contraindre l’homme et le ranger dans les barrières de cette police. Le misérable n’a garde d’enjamber par effet au-delà ; il est entravé et engagé, il est assujetti de pareille obligation que les autres créatures de son ordre, et d’une condition fort moyenne, sans aucune prérogative, préexcellence vraie et essentielle. […]

Je dis donc, pour revenir à mon propos, qu’il n’y a point d’apparence d’estimer que les bêtes fassent par inclination naturelle et forcée les mêmes choses que nous faisons par notre choix et industrie. Nous devons conclure de pareils effets pareilles facultés et confesser par conséquent que ce même discours [intelligence], cette même voie, que nous tenons à ouvrer [que nous suivons dans nos ouvrages], c’est aussi celle des animaux.

Montaigne, Apologie de Raymond Sebond, GF, 1989, p. 57-71.

 

- DescartesDiscours de la méthode, 1636 : l’homme diffère par nature des animaux du fait qu’il soit le seul à posséder une âme

S’il y avait de telles machines, qui eussent les organes et la figure d’un singe, ou de quelque autre animal sans raison, nous n’aurions aucun moyen pour reconnaître qu’elles ne seraient pas en tout de même nature que ces animaux, au lieu que, s’il y en avait qui eussent la ressemblance de nos corps et imitassent autant nos action que moralement il serait possible, nous aurions toujours deux moyens très certains pour reconnaître qu’elles ne seraient point pour cela de vrais hommes. Dont le premier est que jamais elles ne pourraient user de paroles, ni d’autres signes en les composant, comme nous faisons pour déclarer aux autres nos pensées. Car on peut bien concevoir qu’une machine soit tellement faite qu’elle profère quelques-unes à propos des actions corporelles qui causeront quelque changement en ses organes : comme, si on la touche en quelque endroit, qu’elle demande ce qu’on veut lui dire ; si en un autre, qu’elle crie et qu’on lui fasse mal, et choses semblables ; mais non pas qu’elles les arrange diversement, pour répondre au sens de tout ce qu’on lui dira en sa présence, ainsi que les hommes les plus hébétés peuvent le faire. Et le second est que, bien qu’elles fissent plusieurs choses aussi bien, ou peut-être mieux qu’aucun de nous, elles manqueraient infailliblement en quelques autres, par lesquelles on découvrirait qu’elles n’agiraient pas par connaissance, mais seulement par la disposition de leurs organes. Car au lieu que la raison est un instrument universel, qui peut servir en toutes sortes de rencontres, ces organes ont besoin de quelque particulière disposition pour chaque action particulière ; d’où vient qu’il est moralement impossible qu’il y en ait assez de divers en une machine pour la faire agir en toutes les occurrences de la vie, de la même façon que notre raison nous fait agir.

Or, par ces deux mêmes moyens, on peut aussi connaître la différence qui est entre les hommes et les bêtes. Car c’est une chose bien remarquable qu’il n’y a point d’hommes si hébétés et si stupides, sans en excepter mêmes les insensés, qu’ils ne soient capables d’arranger ensemble diverses paroles, et d’en composer un discours par lequel ils fassent entendre leurs pensées ; et au contraire, il n’y a point d’autre animal, tant parfait et tant heureusement né qu’il puisse être, qui fasse le semblable. Ce qui n’arrive pas de ce qu’ils ont fautes d’organes, car on voit que les pies et les perroquets peuvent proférer des paroles ainsi que nous, et toutefois ne peuvent parler ainsi que nous, c’est-à-dire en témoignant qu’ils pensent ce qu’ils disent ; au lieu que les hommes qui, étant nés sourds et muets, sont privés des organes qui servent aux autres pour parler, autant ou plus que les bêtes, ont coutume d’inventer d’eux-mêmes quelques signes, par lesquels ils se font entendre à ceux qui, étant ordinairement avec eux, ont loisir d’apprendre leur langue. Et ceci ne témoigne pas seulement que les bêtes ont moins de raison que les hommes, mais qu’elles n’en ont point du tout. […]

Et on ne doit pas confondre les paroles avec les mouvements naturels, qui témoignent les passions, et peuvent être imités par des machines aussi bien que par les animaux ; ni penser, comme quelques anciens, que les bêtes parlent, bien que nous n’entendions pas leur langage : car s’il était vrai, puisqu’elles ont quelques organes qui se rapportent aux nôtres, elles pourraient aussi bien se faire entendre de nous qu’à leurs semblables. C’est aussi une chose fort remarquable que, bien qu’il y ait plusieurs animaux qui témoignent plus d’industrie que nous en quelques-unes de leurs actions, on voit toutefois que les mêmes n’en témoignent point du tout en beaucoup d’autres : de façon que ce qu’ils font mieux que nous ne prouve pas qu’ils ont de l’esprit ; car, à ce ce compte, ils en auraient plus qu’aucun de nous et feraient mieux en toute chose ; mais plutôt qu’ils n’en ont point, et que c’est la Nature qui agit en eux, selon la disposition de leurs organes : ainsi qu’on voit qu’une horloge, qui n’est composée que de roues et de ressorts, peut compter les heures, et mesurer le temps, plus justement que nous avec toute notre prudence. […]

Après l’erreur de ceux qui nient Dieu, laquelle je pense avoir ci-dessus assez réfutée, il n’y en a point qui éloigne plutôt les esprits faibles du droit chemin de la vertu, que d’imaginer que l’âme des bêtes soit de même nature que la nôtre, et que, par conséquent, nous n’avons rien à craindre, ni à espérer après cette vie, non plus que les mouches et les fourmis ; au lieu que, lorsqu’on sait combien elles diffèrent, on comprend beaucoup mieux les raisons, qui prouvent que la nôtre est d’une nature entièrement indépendante du corps et, par conséquent, qu’elle n’est point sujette à mourir avec lui ; puis, d’autant qu’on ne voit point d’autres causes qui la détruisent, on est naturellement porté à juger de là qu’elle est immortelle.

René Descartes, Discours de la méthode, 1636, GF, p. 79-81.

 

Quelle place pour l’homme dans la nature ? : la classification des animaux de Linné à Darwin.

Linné, Système de la nature, 1735 (extrait cité dans Luc Ferry et Claudine Germé, Des animaux et des hommes, Le livre de poche, 1994, p. 233-236). Il classe l’homme parmi les animaux, mammifères et primates à côté des singes.

Darwin, La descendance de l’homme, 1871. (Cité par Luc Ferry et Claudine Germé, Des animaux et des hommes, Le livre de poche, 1994, p. 309-311)

Quelques naturalistes, profondément frappés des aptitudes mentales de l’homme, ont partagé l’ensemble du monde organique en trois règnes : le règne Humain, le règne Animal et le règne Végétal, attribuant ainsi à l’homme un règne spécial. Le naturaliste ne peut ni comparer ni classer les aptitudes mentales, mais il peut ainsi que j’ai essayé de le faire, chercher à démontrer que, si les facultés mentales de l’homme diffèrent immensément en degré de celles des animaux qui lui sont inférieurs, elles n’en diffèrent pas quant à leur nature. Une différence de degré, si grande qu’elle soit, ne nous autorise pas à placer l’homme dans un règne à part. […] Par conséquent, si l’on veut déterminer la position de l’homme dans le système naturel ou généalogique, l’extrême développement du cerveau ne doit pas l’emporter sur une foule de ressemblances portant sur des points d’importance moindres ou même n’en n’ayant aucune. […]

Si nous considérons la conformation embryologique de l’homme, – les analogies qu’il présente avec les animaux inférieurs, – les rudiments qu’il conserve, – et les réversions auxquelles il est sujet, nous serons à même de reconstruire en partie par l’imagination, l’état primitif de nos ancêtres, et de leur assigner approximativement la place qu’ils doivent occuper dans la série zoologique. Nous apprenons ainsi que l’homme descend d’un mammifère velu, pourvu d’une queue et d’oreilles pointues, qui probablement vivait dans les arbres, et habitait l’ancien monde. Un naturaliste qui aurait examiné la conformation de cet être l’aurait classé parmi les Quadrumanes aussi sûrement que l’ancêtre commun et encore plus ancien des singes de l’ancien et du nouveau monde. […] Il y a sans doute une difficulté à vaincre avant d’accepter pleinement la conclusion à laquelle nous sommes ainsi conduits sur l’origine de l’homme, c’est la hauteur du niveau intellectuel et moral auquel s’est élevé l’homme. Mais quiconque admet le principe général de l’évolution, doit reconnaître que, chez les animaux supérieurs, les facultés mentales sont, à un degré très inférieur, de même nature que celles de l’espèce humaine et susceptible de développement.

DESCARTES, Discours de la méthode-Question d’interprétation philosophique -Question de réflexion littéraire

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Exemple de sujet commenté - sujet zéro n°3 sur le thème des représentations du monde

Déçu par ses études, dont il fait le bilan, le philosophe Descartes décide de voyager. C’est pourquoi, sitôt que l’âge me permit de sortir de la sujétion de mes précepteurs1, je quittai entièrement l’étude des lettres. Et me résolvant de ne chercher plus d’autre science, que celle qui se pourrait trouver en moi-même, ou bien dans le grand livre du monde, j’employai le reste de ma jeunesse à voyager, à voir des cours et des armées, à fréquenter des gens de diverses humeurs et conditions, à recueillir diverses expériences, à m’éprouver moi-même dans les rencontres que la fortune me proposait, et partout à faire telle réflexion sur les choses qui se présentaient, que j’en pusse tirer quelque profit. Car il me semblait que je pourrais rencontrer beaucoup plus de vérité, dans les raisonnements que chacun fait touchant les affaires qui lui importent, et dont l’événement le doit punir bientôt après, s’il a mal jugé, que dans ceux que fait un homme de lettres dans son cabinet, touchant des spéculations qui ne produisent aucun effet, et qui ne lui sont d’autre conséquence, sinon que peut-être il en tirera d’autant plus de vanité qu’elles seront plus éloignées du sens commun, à cause qu’il aura dû employer d’autant plus d’esprit et d’artifice à tâcher de les rendre vraisemblables. Et j’avais toujours un extrême désir d’apprendre à distinguer le vrai d’avec le faux, pour voir clair en mes actions, et marcher avec assurance en cette vie. Il est vrai que, pendant que je ne faisais que considérer les mœurs des autres hommes, je n’y trouvais guère de quoi m’assurer, et que j’y remarquais quasi autant de diversité que j’avais fait auparavant entre les opinions des philosophes. En sorte que le plus grand profit que j’en retirais était que, voyant plusieurs choses qui, bien qu’elles nous semblent fort extravagantes et ridicules, ne laissent pas d’être communément reçues et approuvées par d’autres grands peuples, j’apprenais à ne rien croire trop fermement de ce qui ne m’avait été persuadé que par l’exemple et par la coutume, et ainsi je me délivrais peu à peu de beaucoup d’erreurs, qui peuvent offusquer2 notre lumière naturelle, et nous rendre moins capables d’entendre raison.

DESCARTES, Discours de la méthode, I, 1637

(1) « La sujétion de mes précepteurs » : la tutelle, l’autorité de mes maîtres

(2) « Offusquer » : choquer, aller à l’encontre de

Question d’interprétation philosophique

Quels bénéfices Descartes retire-t-il de ses voyages?

Question de réflexion littéraire

Lire un récit de voyage, est-ce découvrir une autre culture ?

Pour construire votre réponse, vous vous référerez au texte ci-dessus, ainsi qu’aux lectures et connaissances, tant littéraires que philosophiques, acquises durant l’année.

Sujet commenté

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Bibliographie indicative

Les représentations du monde

1) Découverte du monde et pluralité des cultures

Bartolomé de las Casas, Brève relation de la destruction des Indes (1552). Jean de Léry, Histoire d’un voyage faict en la terre du Brésil (1578). Giordano Bruno, De l’infini, de l’univers et des mondes (1584). Montaigne, Essais, I.31 [Des Cannibales] (1588). Galilée, Dialogue sur les deux grands systèmes du monde (1632). Descartes, Le Monde (1633), Discours de la méthode (1637). Denis Veiras, Histoire des Sévarambes (1677). La Hontan, Dialogues de Monsieur le baron de La Hontan et d’un sauvage, dans l’Amérique (1704). Defoe, Robinson Crusoé (1719). Montesquieu, Les Lettres persanes (1721). Voltaire, Micromégas (1752), Essai sur les mœurs (1756), Candide (1759), L’Ingénu (1767), Dictionnaire philosophique [en particulier : Anthropophages, De la Chine] (1769), Lettres chinoises, indiennes et tartares (1776). Kant, Histoire générale de la nature et théorie du ciel (1755). Diderot, Supplément au voyage de Bougainville (1772). 

2) Décrire, figurer, imaginer

Alberti, De la Peinture (1441). Dürer, Traité des proportions (1528). Thomas More, Utopia (1516). Rabelais, Le Quart-Livre (1552). André Thévet, Les singularitez de la France antarctique (1557). Benvenuto Cellini, Vie de Benvenuto Cellini par lui-même (1567). Vasari, Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes [Discours préliminaire, De l’origine des arts du dessin] (1568). Montaigne, Essais, III.6 [Des coches] (1588). Campanella, La Cité du soleil (1604). Francis Bacon, La Nouvelle Atlantide (1627). Cyrano de Bergerac, États et empires de la Lune, États et empires du soleil (1662). Charles Le Brun, Expressions des passions de l’âme (publ. 1727). La Bruyère, Les Caractères (1688-1696). Marivaux, L’île des esclaves (1725). L.-S. Mercier, L'An 2440, Rêve s'il en fut jamais (1771). Diderot, Les Salons (1759-1781), De la poésie dramatique (1758), Paradoxe sur le comédien (1773-1777). 

3) L’homme et l’animal

Montaigne, Essais, II.12 [Apologie de Raymond Sebond] (1580-1588). A. Paré, Des monstres et prodiges (1573). Descartes, Discours de la méthode [5e partie] (1637). La Fontaine, Fables (1668-1694). La Rochefoucauld, Réflexions diverses [Du rapport des hommes avec les animaux] (publ. 1731). Malebranche, la Recherche de la vérité (1674-1678). Perrault, Contes (1697). Madame d’Aulnoye, Contes [La Belle et la Bête] (après 1696). Mandeville, La fable des abeilles (1714). Jonathan Swift, Les Voyages de Gulliver (1735). Buffon, Histoire naturelle (1749-1804). La Mettrie, L’homme-machine (1748). Voltaire, Zadig (1748). Condillac, Traité des animaux (1755). Rousseau, Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité (1755). Voltaire, Dictionnaire philosophique [Bêtes] (1764). Diderot, Le Rêve de D’Alembert (1769). Restif de la Bretonne, La Découverte australe (1781). 

Prolongements :

Homère, Odyssée [chants 9 à 12] (8e s. av. J.-C.). Hérodote, Histoires [livre 2 et 4] (5e s.). Platon, Timée, Critias (4e s.). Aristote, Histoire des animaux, Du Ciel (4e s.). Cicéron, La République (1er s.). Tacite, La Germanie (1er s.). Pline l’Ancien, Histoire Naturelle [extraits livre 2, 8-11] (1er s.). Plutarque, Sur intelligence des animaux ; Sur la consommation de chair ; Que les bêtes ont l’usage de la raison (1er-2e s.). Lucien, Histoires vraies (2e s.). Les Questions de Milinda (Milindapanha). Vincent de Beauvais, Miroir naturel [extraits] (vers 1250). Saga d’Erik le Rouge (13e s.). Marco Polo, Le Devisement du monde (1298). Laplace, Exposition du système du monde [livre V : Précis de l’histoire de l’astronomie] (1796). Kant, Anthropologie du point de vue pragmatique (1798). Darwin, L’origine des espèces (1859). Jules Verne, Voyages extraordinaires (1863-1919). Colette, Sept dialogues de bêtes (1905). Bergson, L’Évolution créatrice (1907). M. Mauss, Essai sur le don (1923- 1924). Victor Segalen, Les Immémoriaux (1907), Essai sur l’exotisme (1955). Kafka, La Métamorphose (1915). Henri Michaux, Un barbare en Asie (1933). G. Bachelard, La Formation de l’esprit scientifique (1938). George Orwell, La Ferme des animaux (1945). Vercors, Les Animaux dénaturés (1952). C. Lévi-Strauss, Tristes Tropiques (1955). T. s. Kuhn, La Structure des révolutions scientifiques (1962). Nicolas Bouvier, L’Usage du monde (1963).

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Date de dernière mise à jour : 01/08/2023

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