La rhétorique dans l'antiquité Grecque, Latine Aristote, Cicéron. Ouverture les mots mentent-ils? La terre est bleue comme une orange Eluard

Humanités Lettres Philosophie Les pouvoirs de la parole, Période de référence : l’Antiquité - nouveau programme bac Semestre 1 de 1ère

Ciceron

Les pouvoirs de la parole

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Ressources académiques, HLP = problématisation, séquences

 La théorie platonicienne de la parole dans Phèdre   - Parcours HLP de l'académie de Nancy   -  Problématisation et documents numériques, académie de Bordeaux

Problématisation sur les pouvoirs de la parole, académie de Strasbourg   -  Académie de Lille, ressources les pouvoirs de la parole et les représentations du monde  

Propositions de séquences élaborées par des professeurs de philosophie et de Lettres de l’académie de Versailles 

Philosophie et poésie d’hier à aujourd’hui    -   -Entre Ulysse et Shéhérazade : la parole et le pouvoir

Accords et désaccords : à quelle condition la parole peut-elle créer du lien ? 

Quelle valeur accorder à la parole qui séduit ?   -   - L’exercice de la parole en démocratie

Propositions de séquences élaborées par les professeurs de l’académie de Dijon

- Projet 1
Un premier axe de travail : comment la parole est constitutive d’une identite?. The?me aborde? : l’autorite? de la parole
Un deuxie?me axe de travail : comment les formes essentielles de la parole (chant, rhe?torique, dialogue) correspondent au conflit entre se?duction et re?flexion, entre de?sir et raison.
The?mes aborde?s : l’art de la parole, les se?ductions de la parole

- Projet 2
Proposition d’entrée dans le thème des "pouvoirs de la parole " par une réflexion en deux temps : d’abord sur l’amour, puis sur la justice.

La rhétorique dans l'antiquité Grecque - La rhétorique d’Aristote

L'art de la parole

 

La rhétorique dans l'antiquité Grecque

La rhétorique d’Aristote : les 3 types de discours

  • épidictique (bon/mauvais)
  • Judiciaire (juste/injuste)
  • politique (utile/inutile)

 

Aristote, en distinguant trois types d'auditeurs, distinguait ainsi trois genres rhétoriques, chacun trouvant à s'adapter à l'auditeur visé et visant un certain type d'effet social : Le délibératif s'adresse au politique et son objectif est de pousser à la décision et à l'action (a pour fin le bien); le judiciaire s'adresse au juge et vise l'accusation ou la défense; le démonstratif fait l'éloge ou le blâme d'une personne (a pour fin le beau, en terme actuel : la valeur).

 

ARISTOTE, Rhétorique, III, 1419a-1419
La péroraison se compose de quatre éléments : le premier consiste à disposer favorablement l’auditoire à notre égard, et défavorablement à l’égard de l’adversaire ; le second à amplifier ou à minorer ; le troisième à susciter les affects dans l’auditoire ; enfin le quatrième, à récapituler. Il va de soi, en effet, qu’on démontre d’abord qu’on dit la vérité et que l’adversaire ment, pour ensuite passer à l’éloge et à la critique, et enfin mettre la dernière main.

On doit se donner deux buts : montrer qu’on est un homme de bien soit aux yeux de l’auditoire soit dans l’absolu, ou montrer que l’adversaire est un homme de rien soit aux yeux de l’auditoire soit dans l’absolu. S’agissant des moyens à employer à cet effet, on a énoncé les lieux selon lesquels on peut faire apparaître les gens comme étant de bon ou de mauvais aloi.

Après cette étape, démonstration faite, il s’agit d’amplifier ou de minorer, selon la nature des choses : car il faut qu’on soit d’accord sur les faits, si on veut en dire l’importance ; il n’y a de croissance des corps, en effet, qu’à partir d’un état préalablement donné. On a dit plus haut quels étaient les lieux à partir desquels amplifier et minorer.

Etape suivante : une fois qu’on a clairement expliqué quelle est la nature des faits et quelle est leur importance, il faut mettre l’auditoire dans les dispositions affectives. Ces dispositions sont la compassion, l’indignation, la colère, la haine, la jalousie, l’émulation et l’esprit de querelle. Pour ces dispositions affectives, on a également indiqué plus haut quels étaient les lieux.

Ainsi, il ne reste plus qu’à rappeler ce qui a été dit jusque-là. Il convient de faire comme certains disent - à tort - de le faire pour l’exorde : car pour que l’auditoire comprenne bien, ils recommandent de répéter souvent les choses. Or, dans l’exorde, il faut énoncer les faits, afin que l’auditoire ne perde pas de vue ce qu’il doit juger, mais dans la péroraison, il faut résumer l’essentiel de la démonstration.

On commence donc par dire qu’on a tenu ce qu’on avait promis : donc il faut dire ce qu’on a établi et pour quelles raisons. On le fait en plaçant en parallèle l’argumentation adverse. Ce parallèle s’obtient soit à partir de tout ce qui a été dit par les deux parties, soit de manière indirecte : « Mon adversaire a dit ceci sur ce point ; moi, j’ai dit cela, et pour telles raisons. » Ou on procède par ironie ; par exemple : « Mon adversaire a dit ceci, moi cela, et qu’en aurait-il été s’il avait démontré ceci au lieu de cela ? » ou encore de manière interrogative : « Qu’est-ce qui n’a pas été démontré ? » ou bien : « Qu’est-ce qu’a démontré mon adversaire ? » Soit donc selon ce parallèle soit par le reprise de l’ordre naturel des arguments, on doit reprendre ses propres arguments, et ensuite, si o le veut, séparément, l’argumentation de l’ adversaire.

A la fin du discours, la formulation en asyndète est tout indiquée, afin de lui donner la forme d’une conclusion, et non celle d’un argument : « J’ai parlé, vous avez entendu, vous connaissez l’affaire, à vous de juger. »

 

La Rhétorique est un ouvrage d'Aristote en philosophie traitant de l’art oratoire (ou rhêtoriké tekhnê), c'est-à-dire de « l'apprentissage de la capacité de discerner dans chaque cas ce qui est potentiellement persuasif ». Il est divisé en trois livres : le premier est consacré à la définition et au fonctionnement de la rhétorique, le second à la psychologie des locuteurs et le dernier aux effets de style.
 

La rhétorique use des mêmes moyens que ceux de la logique, mais au lieu d'argumenter sur des vérités ou des postulats scientifiques, elle argumente, usant des mêmes méthodes, sur des  opinions,

des vérités singulières. La rhétorique use ainsi de l'argumentation alors que la logique use de la démonstration. C'est pourquoi la rhétorique est, chez Aristote, le moyen propre au débat et à la réflexion dans la vie politique, la polis, tandis que la logique, opératoire dans la science, est inefficace et même nuisible dans la vie politique. La Rhétorique forme ainsi l'articulation pratique, dans l'œuvre d'Aristote, entre la Politique, les Éthiques, et la Logique. Elle explique comment et pourquoi l’homme, animal doué de raison et qui parle (en grec ces deux qualités se nomment simplement le λ?γος), utilise la parole efficacement utilisée pour parfaire, dans la polis, sa nature.
 

La rhétorique s'appuie toujours sur des preuves. La preuve est ainsi une démonstration, car si nous admettons une preuve comme vraie, c'est nécessairement qu'il y a eu démonstration au préalable. La rhétorique vise donc à établir le vrai et le juste. La rhétorique opère donc comme la dialectique : son but n'est pas tant de persuader que de voir l'état probable des choses par rapport à chaque question.

Aristote distingue ensuite deux types de preuves :

les preuves indépendantes ou externes (antheknaî) qui sont toutes celles qui ne sont pas fournies par l'orateur, mais préexistent à son action, comme les témoignages.

les preuves dépendantes ou internes (euteknaî) qui sont toutes celles qu'il est possible de réunir grâce à la rhétorique et propres au savoir et au talent de l'orateur.

L'orateur doit donc tirer parti des premières, et trouver les secondes. Les preuves dépendantes sont elles-mêmes de trois sortes :

  • les premières résident dans le caractère moral de l'orateur qui doit inspirer confiance;
  • les secondes tiennent à la disposition d'esprit des auditeurs;
  • les troisièmes relèvent du caractère persuasif du discours en lui-même, lorsque l'orateur démontre la vérité d'une proposition.

Les moyens de la démonstration qui valent pour chaque discours : le judiciaire a le syllogisme rhétorique comme instrument principal, le délibératif privilégie l'exemple et l'épidictique enfin met en avant l'amplification

 

La rhétorique dans l'antiquité latine

Cicéron et les 3 objectifs de l’orateur

 

Cicéron assigne trois objectifs à la rhétorique :

  •  Docere : l’orateur doit instruire et informer son auditoire,

  •  Delectare : il doit lui plaire, le charmer,

  •  Movere : il doit l’émouvoir.

Les 5 principes de l'art oratoire

L’inventio (en latin, pour « invention ») : c’est la capacité à trouver des idées, des exemples et des arguments…

  • La dispositio : une fois ces idées trouvées, il faut les organiser  de manière cohérente pour développer une argumentation convaincante. = la logique (argumentation) et la rhétorique

  • L’elocutio : c’est la rhétorique au sens de figures de style, de mots, d’idées, tournures de phrases, grammaire et vocabulaire à employer.

  • L’actio : l’action désigne la gestuelle et le langage corporel, =agir le corps tout entier

  • La memoria, ou mémoire

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?A consulter 

Textes sur les pouvoirs de la parole

Réfutation(l’art de confisquer la parole de l’autre)-Pathos -Cicéron, Orator, XXXVII-XXXVIII- XXXVI Comment traiter les parties du discours-

Réfutation (l’art de confisquer la parole de l’autre)

Pathos 

Cicéron, Orator, XXXVII-XXXVIII

Le pathétique 

S’il s’y prend bien, l’orateur soulèvera l’admiration par deux autres ressorts. L’un, que les Grecs nomment η?θικο?ν, « l’éthique », concerne les tempéraments, les moeurs et tout ce qui a trait aux habitudes de la vie en société. L’autre le παθητικο?ν, « le pathétique », consiste à émouvoir et à exciter les esprits ; c’est là que triomphe l’éloquence. Le premier est doux, agréable et propre à gagner la bienveillance de l’auditoire ; le second, violent, enflammé, impétueux, arrache la victoire et rien n’arrête sa force torrentielle. […]

Que dirai-je des appels à la compassion ? Je m’en suis d’autant plus servi que l’on me laissait toujours le soin de la péroraison, même si nous étions plusieurs à plaider. Si je passais pour y exceller, je ne le devais pas à mon intelligence mais à ma sensibilité. […]

Mais nous ne devons pas émouvoir les juges en faisant uniquement appel à leur pitié. Je l’ai souvent fait, comme dans cette péroraison où je suis allé jusqu’à prendre un petit enfant dans mes bras. J’ai fait de même dans une autre cause où je défendais un illustre accusé : lui ayant demandé de se lever, j’ai brandi son fils, remplissant alors le forum de pleurs et de gémissements. Il faut irriter ou apaiser les juges, éveiller en eux l’envie ou la faveur, le mépris ou l’admiration, la haine ou l’amour, le désir ou le dégoût, l’espérance ou la crainte, la joie ou la douleur.

Exorde et captatio benevolentiae : « se concilier l’auditoire, éveiller son attention et susciter son intérêt »

Péroraison : « qui embrasera ou apaisera les esprits »

Cicéron, Orator, XXXVI

Comment traiter les parties du discours

L’exorde sera modeste ; sans être encore enflammé par l’emploi d’un vocabulaire noble, il sera d’une simplicité pénétrante, semé de traits visant à se faire valoir ou à discréditer la partie adverse. Les narrations seront plausibles et claires, exposées sur un ton plus proche de la conversation que du récit historique. Puis, si la cause est simple, le fil de l’argumentation le sera aussi, autant pour démontrer que pour réfuter ; le style s’élèvera à mesure que le sujet grandira.

Agir sur l’autre : la flatterie, la puissance, l’appât du gain

=> adapter son discours à l’auditoire, cibler

Cicéron, Orator, XXXV

la cible 

Mais puisque je ne cherche pas un orateur à former mais un orateur que je puisse apprécier, j’apprécierai d’abord celui qui verra ce qu’il convient de dire. L’homme éloquent, en effet, saura avant tout s’adapter aux personnes et aux circonstances. Car j’estime qu’on ne peut employer le même langage dans toutes les situations, parler de la même manière à tout le monde et devant n’importe qui, que ce soit pour accuser ou défendre quelqu’un.

 

 

Ouverture les mots mentent-ils ? « La terre est bleue comme une orange », Paul Eluard

Ouverture

Littérature = les mots mentent-ils ?

« La terre est bleue comme une orange », Paul Eluard, 1929

 

Paul Éluard (1895-1952) est l'un des représentants majeurs du Surréalisme. Proche de Breton et d'Aragon

La terre est bleue comme une orange est le premier vers du 7ème poème du premier chapitre "Premièrement" composant le recueil "L'amour la poésie" dont le titre lui fut inspiré par sa fille de 10 ans. "L'amour la poésie" fut publié en 1929 et fait suite au premier recueil "Capitale de la Douleur".

 

Lecture de la poésie

 

La terre est bleue comme une orange

Jamais une erreur les mots ne mentent pas

Ils ne vous donnent plus à chanter

Au tour des baisers de s’entendre

Les fous et les amours

Elle sa bouche d’alliance

Tous les secrets tous les sourires

Et quels vêtements d’indulgence

À la croire toute nue.


 

Les guêpes fleurissent vert

L’aube se passe autour du cou

Un collier de fenêtres

Des ailes couvrent les feuilles

Tu as toutes les joies solaires

Tout le soleil sur la terre

Sur les chemins de ta beauté.

Une affirmation paradoxale

Au début de ce poème, Eluard affirme successivement que « la terre est bleue comme une orange » et « jamais une erreur les mots ne mentent pas ». La première phrase semble pourtant énoncer un contre vérité évidente puisque si l'on peut admettre que la terre est à dominante bleue en raison de la surface occupée par les océans, les oranges ne le sont pas. Que signifie donc cette image poétique ?

Différentes interprétations possibles

L'image poétique peut naître de la collusion de deux affirmations séparées : « la terre est bleue » et « la terre est ronde et légèrement aplatie aux pôles comme une orange. L'orange peut être la couleur opposée au bleu sur le cercle chromatique. D'autres font le rapprochement avec les moisissures bleues qui envahissent une orange quand elle commence à pourrir.

La force de la parole poétique

Ces différentes explications n'épuisent pas la force de l'explication de la métaphore poétique. Dire que la terre est bleue comme une orange, c'est trouver dans le langage, les ressources pour faire naître dans l'esprit du lecteur une image qui ne peut pas exister ailleurs que dans cet énoncé même. La poésie montre toute la fécondité du langage par rapport à l'usage ordinaire que nous en faisons, même quand c'est pour décrire une réalité bien connue.

Au-delà de la vérité et du mensonge, les mots ne donnent-ils pas à chanter, comme le suggère le troisième vers du poème ?

La langue comme dévoilement et ouverture à ce qui est Martin Heidegger, « L'Origine de l'oeuvre d'art »

Ce poème permet-il d'illustrer les propos d'Heidegger sur le rôle du poème?

 

La langue comme dévoilement et ouverture à ce qui est

Martin Heidegger, « L'Origine de l'oeuvre d'art »

 

Si tout art consiste à faire apparaître quelque chose, Heidegger isole le cas du poème en lequel il voit l'essence même de l'activité artistique. Le langage, à travers la parole poétique, est en lui-même la manifestation de la vérité

 

Tout art est, est son essence, Poème... Cependant, l'oeuvre parlée, la poésie au sens restreint, n'en garde pas moins une place insigne dans l'ensemble des arts.

Pour voir cela, il suffit d'arriver à une juste notion de la langue. Selon l'idée courante, la langue est une sorte de moyen de communication. Elle sert à converser et à se concerter : de façon générale à s'expliquer et à se comprendre. Mais la langue n'est pas que l'expression orale et écrite de ce qui doit-être communiqué. Elle est plus que la simple mise en circulation de ce qui est déjà manifeste ou caché, signifié comme tel en mots et en phrases - car c'est bien elle, la langue, qui fait advenir l'étant en tant qu'étant à l'ouvert. Là où aucune langue ne déploie, comme dans l'être de la pierre, de la plante ou de l'animal, là il n'y a pas d'ouverture de l'étant et, par conséquent, pas d'ouverture du Non-étant et du vide.

Dans la mesure où la langue nomme pour la première fois l'étant, un tel nommer permet seulement à l'étant d'accéder à la parole et à l'apparaître. Ce nommer, c'est la nomination de l'étant à son être, à partir de l'être. Ce dire est ainsi le projet de l'éclaircie où est dit comment et en tant que quoi l'étant parvient à l'ouvert... La langue elle-même est Poème au sens essentiel.

 

Comprendre les arguments qui conduisent à la thèse

Thèse : le poème n'est pas une forme d'art parmi d'autres, il est l'essence même de l'art

1 – La fonction première du langage n'est pas de communiquer quelque chose de déjà connu mais de dire les choses, de les nommer, autrement dit de révéler ce qui est et qui était caché jusque-là.

2 - A l'inverse, parce qu'ils ne disposent pas de langage, les plantes et les anmaux restent fermés à tout ce qui est

3 – Si parler, c'est dire ce qui est et par là même le faire être, alors la langue est dans son essence poème.

 

 

Date de dernière mise à jour : 12/01/2023

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