Ponge la rage de l expression

Analyse du recueil de Francis Ponge La Rage de l'expression et du parcours bac : "Dans l'Atelier du poète"

Dans l'atelier du poète 

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Ponge la rage de l expressionPonge

Francis ponge 1Francis Ponge (27 mars 1899 – 6 août 1988)
Francis Ponge nait à Montpellier le 27 mars 1899, de Juliette Saurel et Armand Ponge, issu d’une famille huguenote nîmoise. Ponge était un amateur d'art et de philosophie
En 1915, il obtient la meilleure note de l’académie en philosophie pour une dissertation sur ' L’art de penser par soi-même '.
En 1916, il entre en hypokhâgne au lycée Louis-le-Grand. Il publie son premier sonnet sous le pseudonyme de Nogères.


En 1921, il rédige ' Esquisse d’une parabole ',
Francis Ponge se dit lui-même de la génération surréaliste, il partage certains principes – mysticisme, irrationnel et appel à l’inconscient –
il adhère au parti socialiste et entre chez Gallimard suite à sa rencontre avec Paulhan.
En 1926, il publie Douze Petits Ecrits que l’on peut définir comme le fondement de sa poétique.
En 1937, il entre au Parti Communiste Français et en 1942, il publie Le Parti Pris des Choses qui marque son entrée dans le monde littéraire.
en 1947 acquiert une renommée internationale alors qu’il est professeur à l’alliance française.
Il publie Proêmes en 1948, La Seine en 1950, La Rage de l’Expression en 1952, Le Soleil placé en abîme en 1954, Pour un Malherbe en 1965 ainsi que divers textes sur la peinture.
Il meurt à Bar-sur-Loup le 6 août 1988.

Quiz

Connais-tu Ponge et le recueil "La Rage de l'expression"? 

Connais-tu ton parcours bac "Dans l'atelier du poète"? 

Problématique :
Comment écrire pour rendre compte des choses et du monde de la manière la plus juste possible? 

Ponge la rage de l expressionPlan du dossier bac :


I - Du Parti pris des choses à la Rage de l'expression

  • Les chemins de l'écriture 
  • Le Parti pris des choses
  • La Rage de l'expression
  • Dans quel but?
  • Comment? 
  •  De la rage à la joie de l'expression 
  •  Structure du recueil 

II - Parcours bac : "Dans l'Atelier du poète"
1 - La création poétique : une méthode

 - La rage du poète
2 - L'atelier poétique
⦁    Définition du poète 
⦁    La fabrique du texte
⦁    Comment Ponge met-il en avant le processus de sa pensée pour rendre le travail préparatoire visible? 
⦁    Dans quel but?
⦁    "Une co-naissance plus sérieuse"
III - Une visée morale de l'écriture
Poésie = l'action poétique
IV - Révolution artistique / poétique 
Une nouvelle manière d'habiter le monde et de le décrire 
 un esprit nouveau
1 - Une époque en mouvement 
⦁    Une poésie en mouvement : Blaise Cendrars 
⦁    Picasso / Braque 
⦁    Le 7ème art / Cocteau 
2 - Le surréalisme 
⦁    Dossier bac 
⦁    Elan poétique / Elan patriotique : René Char, Fragment 128, Feuillets d'Hypnos  
 

 

I - Du Parti pris des choses à la Rage de l'expression Les chemins de l'écriture 

Francis ponge 1I - Du Parti pris des choses à la Rage de l'expression
Les chemins de l'écriture 

1942 - Publication du Parti pris des choses qui apporte à Ponge une grande notoriété
1944 - Jean Paul Sartre publie un article sur Ponge et son oeuvre "L'Homme et les choses" 
1938 à 1944 - Ponge écrit les textes du recueil "La Rage de l'expression"
1952 - Publication du recueil "La Rage de l'expression" 
Le Parti pris des choses :
 Poésie descriptive
Ponge tente de définir des objets du quotidien comme Le cageot, l'huître, le pain... 
"Le monde muet est notre seule patrie" Méthodes
La Rage de l'expression
Dépassement de la poésie descriptive car Ponge fait de l'expression, l'unique moyen de décrire et de connaître les objets; le titre du recueil témoigne de l'importance accordée à la parole, à la réflexion sur le langage et le pouvoir des mots dont la mission essentielle est de définir fidèlement l'objet. Le titre est à lui seul le reflet d'une coïncidence des mots aux choses dans une oeuvre dominée par le thème de la nature, la faune et la flore, objet de son projet poétique. La rage de l'expression chez Ponge se traduit par une volonté de décortiquer le langage
Dans quel but?
Réconcilier l'homme et le monde, unir l'homme aux choses
Comment?
Par le langage : trouver par le mot, la proximité, l'immédiateté, la conformité, la fidélité, l'équivalence de la chose à décrire. 
L'expression est un travail de recherche, de justesse pour rester fidèle aux choses par les mots. 
De la rage à la joie de l'expression :
Néologisme : "objeu" : entre objet et jeu pour dire l'exploration du langage. Le mot s'associe à l'importance du jeu à deux niveaux, la typographie et le signifiant. 
Ex : "Notes prises pour un oiseau"
"oiseau contient toutes les voyelles"
"j'aurais préféré l'L de l'aile : OILEAU..., le V des ailes déployées, le V d'avis : OIVEAU"
Ainsi OILEAU et OIVEAU par leur sonorité et typographie conviendraient mieux pour désigner l'animal qui vole que le terme "oiseau". 
Ex 2 : le néologisme "objoie" entre objet et joie pour décrire sa joie procurée par l'écriture car aucune expression n'est jamais définitive : 
"J'ai voulu de ce poème en prose faire un poème en vers. Alors que j'aurais dû défaire ce poème en prose pour intégrer les éléments intéressants qu'il contenait dans mon rapport objectif sur le Bois  de pins".

Structure du recueil 

Francis ponge 1Structure du recueil 
La Rage de l'expression est un recueil composé de sept sections. 
"Berges de la Loire" : 
un texte inaugural consacré à la quête poétique. Le poète se met au service de l'objet. 
"La Guêpe" : 
c'est l'objet du dossier en plusieurs fragments dont "l'essaim" fait écho à "l'essaim de mots justes". "L'essaim" du point de vue étymologique signifie groupe d'abeilles en analogie avec l'écriture du poète et sa quête du mot juste "l'essaim de mots justes".  La description est humoristique voire scientifique. 
"Notes prises pour un oiseau" 
Cette partie du recueil propose une visée de son travail dans un souci d'union de l'homme et du monde. Le point de départ de ce dossier est une peinture d'Ebiche, peintre Polonais. Ponge tente de trouver les caractères communs aux oiseaux
"L'oeillet" :
Il y est question de la démarche poétique méthodique et soucieuse d'explorer le langage. Ces textes s'attachent à sonder les profondeurs de l'expression 
"Le Mimosa" 
A partir du mimosa, Ponge s'amuse à en explorer les possibilités lexicales pour devenir objet de plusieurs variantes. "Oh! qu'il est difficile d'approcher de la caractéristique des choses!" 
"Le Carnet du Bois de pins" 
"Le plaisir des Bois de pins" 
⦁    Il est composé de quatre parties :
⦁    "Le plaisir des Bois de pins"
⦁    "Formation d'un abcès poétique" : texte teinté d'ironie autour du terme d'abcès relativement à la description du Bois des pins et ses variantes. 
⦁    "Tout cela n'est pas sérieux" : l'objet de la description s'enrichit des variations poétiques des parties précédentes
⦁    "Appendice au "Carnet du Bois de pins" : cette partie est consacrée à la création poétique "Appendices". Elle s'enrichit de "Pages bis", 6 août 1940 et de "Correspondances" 1941
"La Mounine ou Note après coup sur un ciel de Provence" 
Transcription de son ressenti des beautés du ciel d'Aix en Provence. Il réfléchit au sens de son écriture sur la base d'une démarche proche de celle d'un scientifique.
 

II - Parcours bac

 "Dans l'Atelier du poète"
 

1 - La création poétique : une méthode

Francis ponge 11 - La création poétique : une méthode
Révéler le processus d'écriture chez Ponge signifie méthode de création au sens de chemin suivi par le poète. 
"My creativ method" : méthode désigne le chemin dont Ponge se sert pour illustrer sa poétique après Le Parti pris des choses. Il évoque les différentes étapes de son travail caractéristiques du processus d'écriture. L'écriture poétique suppose un travail sur le langage, La Rage de l'expression révèle la création poétique, son évolution au sens d'un travail et d'une méthode d'écriture toujours relancée par sa quête. 
 - La rage du poète
Les objets dans La Rage de l'expression ne sont plus les objets du quotidien du Parti pris des choses mais le monde animal avec les oiseaux, la guêpe et le monde naturel avec l'oeillet, le mimosa, le ciel de Provence, les berges du fleuve, le bois de pins. Mais les poèmes en prose dans le recueil de 1952 sont le résultat d'un travail préparatoire, l'exploration du langage pour accorder les particularités de l'objet et la forme poétique. 
Cet acharnement à trouver l'équivalence de l'objet par les mots suppose de se concentrer exclusivement sur le sujet sans s'en détourner "revenir toujours à l'objet lui-même, à ce qu'il a de brut, de différent" - Berges de la Loire. 
Avant de trouver les mots, d'explorer le langage, il faut explorer la chose. Si la chose peut-être nommée, les mots doivent se matérialiser et épouser la forme, la sonorité en plus de la racine étymologique de la chose. Le mot se fait objet, il devient l'objet qu'il décrit. 
C'est un parti pris des choses qui exige que le poème ne soit plus un objet fini car il suppose l'exploration du langage qui est premier avant l'écriture. Cette recherche est présente sous de multiples formes dans le recueil, poèmes en prose, en vers, fragments de journal poétique et notes. 
"C'est une conquête de mon mode d'expression" - Le Mimosa
Cette conquête est enragée. La force de cette dernière est évoquée dans la titre du recueil, c'est un engagement acharné. 

2 - L'atelier poétique

Francis ponge 12 - L'atelier poétique
Définition du poète 

Le poète est tel un peintre, il dissocie et recompose les qualités de l'objet. 
"Notes prises pour un oiseau"
"Le poète c'est un moraliste qui dissocie les qualités de l'objet puis les recompose, comme le peintre dissocie les couleurs, la lumière et les recompose dans sa toile"
Cette quête de la poésie s'alimente de son amour pour l'art et dans les années 1945/1952 de sa fréquentation des peintres comme Picasso, Braque, Fautrier.


La fabrique du texte
Le titre du parcours bac "Dans l'Atelier du poète" est à lui seul révélateur de la complexité de son travail poétique enrichi par le concept "d'atelier". Ce choix de mot "atelier" est à la fois en lien avec la création picturale et poétique. 
L'Atelier poétique : ce vocabulaire pictural se retrouve dans la "La Mounine ou Note après coup sur un ciel de Provence". Le titre suggère un décalage temporel entre l'expérience vécue et l'écriture de cette impression esthétique. On retrouve dans ce texte un vocabulaire pictural très riche ainsi que dans "Notes prises pour un oiseau" dont l'inspiration picturale d'une oeuvre d'Ebiche fait de Ponge, un poète à la démarche similaire au peintre. 
Tout comme l'artiste peintre qui analyse les objets dans les moindres détails pour les recréer, Ponge, l'artiste poète, dissocie les qualités de l'objet pour les faire revivre. Cette démarche s'illustre dans la citation de "Notes prises pour un oiseau", "Le poète dissocie les qualités de l'objet puis les recompose, comme le peintre dissocie les couleurs, la lumière et les recompose dans sa toile". 

 

Comment Ponge met-il en avant le processus de sa pensée pour rendre le travail préparatoire visible?

Ponge la rage de l expressionComment Ponge met-il en avant le processus de sa pensée pour rendre le travail préparatoire visible? 


Le travail est toujours en cours. La parole n'est jamais définitive. On le voit par exemple dans "Le Mimosa" qui propose plusieurs variantes d'un même poème. 
L'atelier pongien est le lieu d'ordonnancement de la parole que le poète travaille progressivement jusqu'à l'élaboration de ses textes organisés sous la forme d'un journal poétique :
- parfois datés, "L'Oeillet", "Le Carnet du Bois de pins"
- Enrichis de remarques, de réflexions par exemple, "L'oeillet". Il propose des variations en vers sur la fleur sous forme de notes et de réflexions sur le langage poétique.  On trouve ainsi "Pages-bis" dans "Carnet du Bois des pins" et des extraits de correspondance ou des astérisques pour souligner l'évolution de ses réflexions dans "Berges de la Loire". 
Ainsi le poète dissocie et recompose comme le peintre.
C'est ainsi qu'il travaille dans son atelier pour fabriquer son texte et dans le but de le matérialiser davantage, il soigne la typographie, s'approprie la page blanche comme le peintre s'approprie sa toile. 


On remarque : 
⦁    Des capitales
⦁    Des minuscules
⦁    Des italiques
⦁    Des parenthèses. 

C'est un travail méthodique qui supppose un outil : Le dictionnaire Littré
- Des recherches : "Le Mimosa"
"Parvenu à ce point, j'allai à la bibliothèque consulter le Littré, la Grande Encyclopédie, le Larousse". La référence au dictionnaire est incontournable pour éclairer les propriétés de l'objet à décrire et l'enrichir de l'étude étymologique : il s'agit de comprendre l'origine du mot. 
- Une démarche quasi scientifique basée sur le travail (contre la poésie inspirée).
"Note d'ordre à propos du ciel de Provence"
"Je me veux moins poète que savant" - je désire mons aboutir à un poème qu'à une formule... s'il est possible de fonder une science dont la matière serait les impressions esthétiques, je veux être un homme de cette science". 


Nouvelle définition proposée de la poésie : 
"Ni un traité scientifique, ni l'encyclopédie, ni Littré : quelque chose de plus et de moins". 
La poésie de Ponge est donc à l'intersection de la rigueur scientifique et des impressions esthétiques. Elle se situe entre la science et l'art.


Dans quel but Ponge met-il en avant le processus de sa pensée? 
Du poème à l'histoire du poème, Ponge recherche le partage d'une connaissance : "Une co-naissance plus sérieuse". 

"Une co-naissance plus sérieuse"

Francis ponge 1"Une co-naissance plus sérieuse"
Lorsque le langue devient un obstacle à la connaissance, il faut le surmonter avec acharnement, c'est la rage de l'expression 
- Dépasser l'usage commun des stéréotypes, des clichés et de l'arbitraire du langage pour s'ouvrir à un nouveau langage d'associations et de combinaisons pour que le mot devienne l'équivalent de la chose. Dans ce souci de proximité, de fidélité, Ponge propose dans son recueil divers rapprochements. Ainsi le Mimosa est "poudré comme Pierrot". Les oiseaux sont "des rats du ciel, des éclairs viandeux". Notes prises pour un oiseau. 
Il s'agit d'exploiter toutes les associations possibles sans excès poétiques dans une pluralité d'expressions même les plus improbables. Ainsi, le moineau se fait "clochard", les oiseaux en général pour ne pas citer les courtisans de l'époque, deviennent "des mignons crasseux et pouilleux, aux fraises sales". 
Le pouvoir du langage est un jeu ludique comme le suggère "Formation d'un abcès poétique" dont le risque est d'aligner des mots qui n'ont plus de sens : contre le dérèglement du langage qui est une chose sérieuse

III - Une visée morale de l'écriture Poésie = l'action poétique

Ponge la rage de l expressionIII - Une visée morale de l'écriture


Poésie = l'action poétique
Dans l'atelier du poète, la poésie qu'il faut redéfinir hors de ses carcans, se fabrique. 


"Lutter pour les Lumières"
En analogie avec la philosophie de Camus, Ponge reconnaît l'absurdité du monde. Nous devons rappeler sa position antireligieuse et son combat contre l'obscurantisme au profit des Lumières. 
L'écriture poétique doit éclairer l'homme et le monde. 
"La Mounine ou Notes après coup sur un ciel de Provence" : "il s'agit de cueillir (à l'arbre de la science) le fruit défendu, n'en déplaise aux puissances d'ombre qui nous dominent, à M. Dieu en particulier". 
"Le Saint-Esprit est bien une colombe si je ne m'abuse", Notes prises pour un oiseau. 
Ponge propose une écriture tournée vers l'homme et détournée de Dieu au profit d'une "Co-naissance plus sérieuse". 


Portée morale d'une écriture investie d'une mission : 
- Celle d'enseigner à l'homme son véritable rapport au monde
- Celle de grandir l'homme "Faire gagner à l'esprit humain ces qualités dont il est capable et que seule sa routine l'empêche de s'approprier", "L'Oeillet". 
- Celle de le rendre meilleur en changeant son regard sur le monde par le langage.


Visée morale de l'écriture :
 réconcilier l'homme et le monde par l'écriture 
"Le Carnet du Bois de pins" - "Un monde nouveau où les hommes, à la fois et les choses connaîtront des rapports harmonieux : voilà mon but poétique et politique" 
 

IV - Révolution artistique / poétique Une nouvelle manière d'habiter le monde et de le décrire un esprit nouveau -

Francis ponge 1IV - Révolution artistique / poétique  Une nouvelle manière d'habiter le monde et de le décrire   un esprit nouveau - 

1 - Une époque en mouvement 

⦁    Une poésie en mouvement : Blaise Cendrars 
Exemple avec la notion de voyage. La Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France, Blaise Cendrars. 
Commentaire ci-dessous
Blaise Cendrars, La Prose du Transsibérien et de la petite Jeanne de France

⦁    Picasso / Braque 
Dans le domaine de la peinture, pour illustrer l'époque en mouvement, nous pouvons citer Picasso et Braque par exemple. Le cubisme est une utilisation de formes géométriques pour décomposer et recomposer le monde. Le fauvisme est un mouvement pictural qui participe de la révolution culturelle par les sujets traités et la manière de les appréhender. 
⦁    Le 7ème art / Cocteau 
Le cinéma s'adapter à l'époque qui est en mouvement. Cocteau compose plusieurs films dans le prolongement de son oeuvre poétique et picturale. L'univers poétique se prolonge, se concrétise visuellement. 

 

2 - Le surréalisme 
Un renouvellement des idées. Une philosophie de vie 
⦁    Dossier bac 
⦁    Elan poétique / Elan patriotique : René Char, Fragment 128, Feuillets d'Hypnos 
La poésie est un chant de résistance contre le nazisme. 

René  Char  est  un  auteur  français  né  en  1907  et  mort  en  1988
Les  Feuillets  d’Hypnos comprennent 237 textes écrits au maquis durant l’occupation allemande en 1943 et 1944, il est membre de la résistance -  Hypnos est dans la mythologie le Dieu du Sommeil, le veilleur qui attend l’aube et celui qui attend la lumière. Ils sont dédiés à Albert Camus.
 Le fragment 128 est  un poème en prose, le plus long du recueil : il raconte l’arrivée de soldats nazis dans un petit village du sud de la France dans lequel un résistant se cache. 
 Problématique :
En quoi ce texte est-il un hommage à la résistance? 
Plan
Mouvement 1 : « Le boulanger… commença l’épreuve ». 
Une anecdote, une histoire vraie dans le respect du schéma narratif
Mouvement 2 : « Les habitants furent jetés… cette échéance »
Le lieu de l’épreuve
Mouvement 3 : « Alors apparut … rompre »
Victoire de la solidarité sur la barbarie : la résolution du conflit
Mouvement 4 : la dernière phrase 
Amitié, reconnaissance et héroïsme 

Consulter le commentaire linéaire 

 

La prose du transsibérien, Blaise Cendrars. Commentaire littéraire

La prose du transsibérien, Blaise Cendrars

La prose du transsibérien et de la petite Jehanne de France évoque le voyage en train qui conduisit Cendrars, alors âgé de 16 ans de Russie en Mandchourie. Dans cette poésie, il transcrit les impressions fugitives que font naître le voyage et la vitesse. L’écriture est singulière, elle se caractérise par l’emploi fréquent de propositions nominales et de procédés de juxtapositions. Il s’efforce de saisir les impressions et les sensations dans leur immédiateté. Il renonce à la ponctuation. Le poème ferroviaire, où le chemin de fer devient comme la caméra d’un cinéaste inspiré. Cendrars apparait comme l’un des initiateurs de la modernité poétique en s’inspirant des courants artistiques les plus novateurs du début du siècle. Le titre même nous indique d’emblée sa singularité. Le mot prose désigne une manière de s’exprimer qui n’est pas assujettie aux lois d’une mesure et d’un rythme régulier. Cendrars revendique une liberté d’écriture éloignée des contraintes. Ce texte ne correspond pas aux conventions poétiques, il y a des dialogues, des phrases nominales et des onomatopées, la jeune femme est présentée comme la compagne de voyage du poète. Nous allons étudier la représentation de la réalité à travers ce voyage ferroviaire.

     I – La représentation de la réalité
     1 – Un voyage initiatique

Ce long poème en vers libres est d’une grande innovation formelle du point de vue de la modernité poétique. Il relate un voyage qui possède une dimension nouvelle, le poète est en compagnie d’une femme étrange appelée la petite Jehanne. Ce voyage a lieu dans des conditions insolites, cela évoque donc une expérience vécue, « je viens de trouver une place en Russie »,  dit Cendrars à un camarade de Bâle le 8 septembre 1904. Cette aventure va transformer Cendrars, Frédéric-Louis Sauser de son vrai nom, en adulte. C’est un véritable voyage initiatique. Nous savons dès le début du poème que le poète avec Jeanne roulent depuis « 7 jours », « Je suis en route avec la petite Jehanne de France ».
     2 – Liberté typographique et rythmique
Rédigé et publié en 1913, cette poésie nait d’une collaboration avec le peintre Sonia Delaunay. L’auteur restitue sa réalité de façon fragmentaire en s’efforçant de décrire une réalité fuyante qui se recompose sans cesse aux hasards des images, des sentiments et des impressions. Il exploite des effets de rythme et de structure syntaxique. La liberté qu’autorise l’usage du vers libre permet de jouer sur la longueur des vers et d’accentuer la diversité typographique et rythmique. On passe ainsi de vers courts à des vers plus longs, «Chocs » par exemple ne comprend qu’une seule syllabe, la mise en valeur du mot restitue sur le plan sonore, l’effet émotionnel voulu, proche de l’onomatopée. La liberté typographique est pleinement exploitée, disposition décalée des vers, regroupement en strophes ou au contraire mise en valeur d’un vers. Tout comme Apollinaire, Cendrars use de toutes les possibilités figuratives du vers en accord avec les poètes de son temps, ce qu’Apollinaire appellera « Calligramme ». On relève au début du texte les reprises anaphoriques de « je » suivi du verbe être, « je suis », « j’ai été ». La deuxième anaphore est celle du « train », chaque vers apporte une information nouvelle par rapport au vers précédent, tout en maintenant une unité syntaxique par le biais de la reprise anaphorique et d’une unité sémantique. Ce jeu sur la variété dans la reprise semble posséder une analogie avec le trajet ferroviaire qui se déroule lui aussi sur le même mode. Le paysage observé évolue sans cesse mais est toujours restitué depuis un cadre inchangé, c’est la vitre. On retrouve les mêmes tournures syntaxiques. On peut relever les énumérations de mots dont chacun constitue un vers, « Failles », « Chocs », « rebondissements ». Ils évoquent des sons liés à des sensations brutales et sont associés à l’onomatopée  du vers, « Le broun roun roun ». Ils ont un extraordinaire pouvoir de suggestion.
     3 – Une vision fragmentée et elliptique de la réalité
Le vers suivant, « tout est un faux accord » contribue à accentuer l’effet de montage sonore et donne à la réalité une vision fragmentée, « chocs », « rebondissements ». L’aspect elliptique est mis en valeur par l’absence de mots de liaison à l’exception de la conjonction de coordination « et » qui cependant ne créé qu’un lien syntaxique très faible sans exprimer de lien logique ou temporel.
On passe ensuite de la description de la réalité perçue à une vision plus imaginaire.
II – L’évocation du voyage ferroviaire
     1 – Le renouvellement de la perception

« La prose du transsibérien » est l’évocation fascinée d’un long voyage ferroviaire qui donne l’occasion au poète de célébrer au travers d’une de ses représentations les plus impressionnantes, une dimension nouvelle du monde transmise par la vitesse, cela en renouvelle la perception. Le voyage en train est suggéré, nous avons le champ lexical du monde ferroviaire par l’anaphore « roues », « gare », « poteaux ».
     2 – Le mouvement et la vitesse
L’accent est mis sur l’aspect insolite de la perception. Nous avons le mouvement du train lui-même, « Le train fait un saut périlleux et retombe sur toutes ses roues », « Le train retombe sur ses roues », « Le train retombe toujours sur toutes ses roues », « le monde s’étire, s’allonge… ». La personnification du train, il « palpite » accentue l’effet de vitesse. Le mouvement du paysage perçu s’oppose aux éléments immobiles qui jalonnent le parcours, « la Sibérie qui tourne ». Le déplacement rapide de l’espace modifie les « nappes de neige ». Le paysage est déformé par la vitesse qui transforme les perceptions, les gares pendent aux fils télégraphiques, les poteaux gesticulent… Cela peut faire penser aux procédés cinématographiques. Le mouvement finit par griser l’esprit ainsi que le souligne le vers, « le monde s’étire s’allonge et se retire comme une harmonica ». La perception habituelle du monde est perturbée au profit d’associations d’idées et de l’état rêveur dans lequel se trouve le voyageur.
Conclusion
     Cette poésie nous offre une transfiguration du réel concret. On a une vision fragmentée et transfigurée de la réalité comme le suggèrent les analogies de Paris et les comparaisons, cette réalité transformée donne une tonalité fantastique associée à des perceptions visuelles et auditives importantes. Nous restons ainsi face à l’image d’un monde artistiquement recréé, un monde moderne que le vers libre suggère par un rythme déstructuré.

Francis Ponge, "La Rage de l'expression". Parcours bac : "Dans l'atelier du poète"

Ponge Rage de l'expression Parti pris des choses L'atelier du poète

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