Corneille le menteur les etudes lineaires

Pierre Corneille, Le Menteur, acte II scène 5 - Etude linéaire pour l'oral du bac, un aveu héroï-comique. Parcours bac "Mensonge et comédie"

Etude linéaire II,5

Le Menteur au programme du bac de français
1ères générales et technologiques 


 

Objet d’étude pour lequel les œuvres sont renouvelées

Le théâtre du XVIIe siècle au XXIe siècle

  • Pierre Corneille, Le Menteur / parcours : mensonge et comédie.
  • Alfred de Musset, On ne badine pas avec l’amour / parcours : les jeux du cœur et de la parole.
  • Nathalie Sarraute, Pour un oui ou pour un non / parcours : théâtre et dispute.

Lecture de la scène 5


Etude linéaire, vers 591 à 662 
Acte II, scène 5


Géronte, Dorante, Cliton.
Ici, Clarice les voit de sa fenêtre ; et Lucrèce, avec Isabelle, les voit aussi de la sienne

Corneille 1DORANTE.
Souffrez qu'aux yeux de tous
Pour obtenir pardon j'embrasse vos genoux.
Je suis...
GÉRONTE.
Quoi ?
DORANTE.
Dans Poitiers...
GÉRONTE.
Parle donc, et te lève
DORANTE.
Je suis donc marié, puisqu'il faut que j'achève.
GÉRONTE.
 Sans mon consentement ?
DORANTE.
On m'a violenté :
Vous ferez tout casser par votre autorité,
Mais nous fûmes tous deux forcés à l'hyménée
Par la fatalité la plus inopinée...
Ah ! Si vous le saviez !
GÉRONTE.
Dis, ne me cache rien.
DORANTE.
 Elle est de fort bon lieu, mon père ; et pour son bien,
S'il n'est du tout si grand que votre humeur souhaite...
GÉRONTE.
Sachons, à cela près, puisque c'est chose faite.
Elle se nomme ?
DORANTE.
Orphise ; et son père, Armédon.
GÉRONTE.
Je n'ai jamais ouï ni l'un ni l'autre nom.
 Mais poursuis.
DORANTE.
Je la vis presque à mon arrivée.
Une âme de rocher ne s'en fût pas sauvée,
Tant elle avait d'appas, et tant son oeil vainqueur
Par une douce force assujettit mon coeur !
Je cherchai donc chez elle à faire connaissance ;
Et les soins obligeants de ma persévérance
Surent plaire de sorte à cet objet charmant,
Que j'en fus en six mois autant aimé qu'amant.
J'en reçus des faveurs secrètes, mais honnêtes ;
Et j'étendis si loin mes petites conquêtes,
 Qu'en son quartier souvent je me coulais sans bruit,
Pour causer avec elle une part de la nuit.
Un soir que je venais de monter dans sa chambre
(Ce fut, s'il m'en souvient, le second de septembre ;
Oui, ce fut ce jour-là que je fus attrapé),
 Ce soir même son père en ville avait soupé ;
Il monte à son retour, il frappe à la porte : elle
Transit, pâlit, rougit, me cache en sa ruelle,
Ouvre enfin, et d'abord (qu'elle eut d'esprit et d'art ! )
Elle se jette au cou de ce pauvre vieillard,
Dérobe en l'embrassant son désordre à sa vue :
Il se sied ; il lui dit qu'il veut la voir pourvue ;
Lui propose un parti qu'on lui venait d'offrir.
Jugez combien mon coeur avait lors à souffrir !
Par sa réponse adroite elle sut si bien faire,
 Que sans m'inquiéter elle plut à son père.
Ce discours ennuyeux enfin se termina ;
Le bonhomme partait quand ma montre sonna ;
Et lui, se retournant vers sa fille étonnée :
« Depuis quand cette montre ? Et qui vous l'a donnée ?
 - Acaste, mon cousin, me la vient d'envoyer,
Dit-elle, et veut ici la faire nettoyer,
N'ayant point d'horlogers au lieu de sa demeure :
Elle a déjà sonné deux fois en un quart d'heure.
- Donnez-la-moi, dit-il, j'en prendrai mieux le soin. »
 Alors pour me la prendre elle vient en mon coin :
Je la lui donne en main ; mais, voyez ma disgrâce,
Avec mon pistolet le cordon s'embarrasse,
Fait marcher le déclin : le feu prend, le coup part ;
Jugez de notre trouble à ce triste hasard.
Elle tombe par terre ; et moi, je la crus morte.
Le père épouvanté gagne aussitôt la porte ;
Il appelle au secours, il crie à l'assassin :
Son fils et deux valets me coupent le chemin.
Furieux de ma perte, et combattant de rage,
Au milieu de tous trois je me faisais passage,
Quand un autre malheur de nouveau me perdit ;
Mon épée en ma main en trois morceaux rompit.
Désarmé, je recule, et rentre : alors Orphise,
De sa frayeur première aucunement remise,
Sait prendre un temps si juste en son reste d'effroi,
Qu'elle pousse la porte et s'enferme avec moi.
Soudain nous entassons, pour défenses nouvelles,
Bancs, tables, coffres, lits, et jusqu'aux escabelles :
Nous nous barricadons, et dans ce premier feu,
 Nous croyons gagner tout à différer un peu.
Mais comme à ce rempart l'un et l'autre travaille,
D'une chambre voisine on perce la muraille :
Alors me voyant pris, il fallut composer.

En quoi le récit de Dorante à son père est-il un aveu héroï-comique ?

Corneille le menteur les etudes lineaires

 

 

 

Corneille 1

 

Problématique

En quoi le récit de Dorante à son père est-il un aveu héroï-comique ? 
Dans le but de répondre à notre question, nous verrons qu'un aveu retardé, habile dans l'art du mensonge permet à Dorante de raconter une histoire d'amour partagée et empêchée avec Orphise en mettant en scène des péripéties invraisemblables, annonciatrices de la défaite du héros. 
 


Mouvements 
Mouvement 1 - Vers 591 à 604 
Dorante - "Souffrez qu'aux yeux de tous..."
Géronte - "Mais poursuis"
Un aveu habile en art du mensonge 
Mouvement 2 - Vers 605 à 631
Dorante - "Je la vis presque à mon arrivée... / Ce discours ennuyeux enfin se termina" 
Une histoire d'amour avec Orphise
Mouvement 3 - Vers 632 à 652
Dorante - "Le bonhomme partait quand ma montre sonna... / Quand un autre malheur de nouveau me perdit"
Des péripéties fidèles à la tradition des romans précieux 
Mouvement 4 - Vers 653 à 662
Dorante - "Désarmé, je recule, ... / il fallut composer" 
Un héros vaincu 
 

 

Corneille 2

 

Mouvement 1 : 

Un aveu habile en art du mensonge 

L'attente d'une révélation : un aveu retardé 
Face à son père autoritaire, à l'origine d'un mariage forcé, à l'image du patriarcat du XVIIe, Dorante met en scène de manière très suggestive, très vivante, en hypotypose, un récit mensonger digne de la plus haute stratégie. Sa volonté de marier son fils semble inflexible et Dorante s'applique à improviser rigoureusement, pas à pas, le récit d'un mariage purement fictif. 
Il retarde l'aveu par des démonstrations d'humilité, de pardon dans une posture respectueuse vis-à-vis d'un père dont il a défié l'autorité : 

Dorante - "Souffrez qu'aux yeux de tous
Pour obtenir pardon, j'embrasse vos genoux"
 

Pour lire la suite :

Consulter l'étude intégralement corrigée

 


Ce livret pédagogique propose cinq commentaires linéaires intégralement rédigés en rapport avec le parcours bac "Mensonge et comédie".

 

 

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